

Une Étude du Groupe de travail des doctorants de McGill sur la Justice Internationale, Section Rwanda / McGill Doctoral affiliates working group on International Justice, Rwanda Section ( )
Pour le compte de la Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits
Gaëlle Breton-Le Goff
Montréal, 28 novembre 2002
Le statut du Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) autorise sous différents chefs d'inculpation la poursuite des crimes de violence sexuelle commis par des personnes sur le territoire Rwandais ou par les citoyens rwandais sur le territoire d'États voisins durant la période comprise entre le 1er janvier 1994 et le 31 décembre 1994.[1]
Traditionnellement, devant le TPIR les crimes de violence sexuelle sont poursuivis au titre de crime contre l'humanité sous la qualification de viol[2], et au titre de violation grave de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et au Protocole Additionnel II sous la qualification "d'atteintes à la dignité de la personne notamment les traitements humiliants et dégradants, le viol, la contrainte à la prostitution et tout attentat à la pudeur"[3] On peut cependant remarquer quelques tentatives pour poursuivre les violences sexuelles sous des chefs d'accusation moins traditionnels tels que : "autres actes inhumains" (art. 3§i du Statut)[4], ou "torture" (art.3§f du statut)[5] comme crimes contre l'humanité ainsi que les "traitements cruels tels que la torture et les mutilations" comme actes constituant une violation grave de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et au Protocole additionnel II (art.4§a du Statut).
De manière plus limitée, mais confirmée par la Chambre d'appel, les violences sexuelles ont également été retenues dans le cadre de la qualification de génocide comme mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe, notamment dans le précédent Akayesu[6]. Depuis, certains actes d'accusation ont repris cette qualification pour poursuivre des violences sexuelles comme acte de génocide, tout en l'étendant aux chefs d'entente en vue de commettre le génocide et de complicité dans le génocide[7].
Les violences sexuelles commises durant la période du génocide sont nombreuses et variées. Elles recouvrent tout à la fois les actes de viol au sens de la définition élargie de la jurisprudence Akayesu[8], individuel ou en groupe, la destruction ou la mutilation des organes sexuels, génitaux et reproducteurs, la prostitution forcée, la transmission volontaire ou non des maladies sexuellement transmissibles telles que le SIDA, les diverses formes d'attentat à la pudeur (nudité forcée, relations sexuelles publiques) dans le but avéré de détruire physiquement, moralement et socialement l'ethnie Tutsi en humiliant, en punissant et en éliminant les femmes Tutsi pour leur supposée arrogance et supériorité. La campagne anti-Tutsi visait à la fois à exacerber la haine à l'encontre des femmes et à aiguiser le désir sexuel chez les hommes[9]. Ces actes de violence sexuelle ont aujourd'hui des conséquences catastrophiques sur les femmes rwandaises en terme de santé, de réinsertion sociale, de pauvreté, d'incapacité à fonder un foyer, et de séquelles physiques et mentales (post-traumatiques).
Par conséquent, constatant l'importance des violences faites aux femmes durant le génocide rwandais comme outil de destruction d'une partie constituante de la société, constatant l'ampleur des conséquences de ces crimes sur les femmes[10] et la société rwandaise et considérant l'importance de la poursuite de ces crimes pour les victimes, la communauté internationale et le développement du droit international pénal, il revient après sept années de fonctionnement de faire le point sur l'incrimination des poursuites relatives aux violences sexuelles devant le TPIR[11].
La présente étude se fera en trois volets : le premier consistera à aborder la question de la poursuite des violences sexuelles et de son évolution dans les actes d'accusation d'un point de vue quantitatif et historique, le second volet abordera la question d'un point de vue qualitatif. Il s'agira de voir comment les violences sexuelles sont incriminées, selon quelle évolution et avec quels succès. Et enfin, le troisième volet visera à comparer le travail du TPIR en ce domaine avec celui du TPIY afin éventuellement de tirer les leçons d'une amélioration.
Étonnamment, sans doute parce que le fait est trop peu médiatisé et parce que selon le principe bien connu seuls les trains qui n'arrivent pas à l'heure sont remarqués, le nombre d'actes d'accusation contenant des chefs d'accusation pour violence sexuelle représente PLUS DE LA MOITIÉ des actes d'accusation émis par le bureau du procureur du TPIR[12]. En effet, entre 1995 et 2002 (au 30 octobre 2002), le bureau a accusé 63 personnes. Sur ces 63 accusés, 34 sont accusés d'avoir commis personnellement, d'avoir encouragé ou laisser commettre des actes de violences sexuelles. Le schéma suivant en donne une illustration : Il existe donc un engagement au sein du TPIR pour la poursuite des crimes de nature sexuelle.
Toutefois, il convient d'observer les tendances de cette appréhension générale. On observe d'une part que le nombre d'affaires comportant des accusations de violence sexuelle est relativement constant entre 1996 et 2001, ce qui traduit d'une certaine manière un phénomène de plafonnement, c'est à dire que le nombre d'affaires qui contient ces accusations est sensiblement le même quel que soit le nombre de poursuites engagées durant l'année. D'autre part, on observe également que les années 1998, 1999, et 2000 ont donné lieu à des actes d'accusation qui contenaient tous des accusations de violences sexuelles. On observe par contre, depuis 2001, une diminution de ce type d'incrimination dans les actes d'accusation émis par le bureau du procureur. La proportion des actes d'accusation faisant état des violences sexuelles est passée de 100% en 1999-2000 à 35% pour 2001-2002 comme le montre le graphique suivant :
Bien entendu, il ne faudrait pas en déduire de facto et a priori un désintérêt de la poursuite pour les crimes de violence sexuelle, car les actes d'accusations sont élaborés en fonction des preuves matérielles et des témoignages figurant au dossier à charge. D'autre part, d'un point de vue purement statistique, la courbe représentée en point-tillé représente les cas de poursuite pour violence sexuelle indépendamment des dates d'amendement, c'est à dire que leur comptabilisation a été faite par rapport à la date d'émission de l'acte d'accusation, et non en fonction de la date d'amendement (ce qui explique la présence de violence sexuelle dans des affaires de 1995 alors que le véritable intérêt pour cette question n'est apparu qu'en 1997). Ces subtilités doivent donc donner lieu à plus de développements et à un examen approfondi.
Pour mieux comprendre les données précédentes relatives au phénomène de plafonnement et à proportion spectaculaire décrite au paragraphe précédent pour les années 1998 à 2000, il convient d'étudier le graphique suivant :
Plusieurs tendances sont remarquables :
1) Jusqu'en 1997, peu d'actes initiaux incriminent des actes de violence sexuelle. Les deux exceptions sont les affaires NIYITEGEKA (1996) et NTAHOBALI Arsène Shalom (26 mai 1997). Bien que non inconnus des enquêteurs et des procureurs, les crimes de violence sexuelle ne sont pas une priorité de la politique du procureur.
2) Entre 1995 et 1997, la majorité des accusations de violence sexuelle est intégrée par voie d'amendement. Ces amendements concernent en fait les premières affaires qui ont donné lieu à un acte d'accusation au TPIR au début de son activité : AKAYESU (1996), BAGILISHEMA (1995), BAGOSORA (1996), NSENGIYUMVA (1996), MUSEMA (1996). Ces amendements témoignent de la volonté du bureau du procureur de mettre l'accent sur les crimes de violence sexuelle, et par conséquent de la nouvelle orientation de la politique du procureur.
3) Il existe un décalage d'une moyenne de deux années entre l'acte initial dépourvu d'accusation pour violence sexuelle et l'amendement qui les intègre. La seule exception notable est le cas BAGILISHEMA. Son acte d'accusation a été émis en 1995 et amendé pour violence sexuelle en 1999. Ces délais sont attribuables au temps nécessaire au complément d'enquête, à la réécriture de l'acte d'accusation et aux délais procéduraux liés à la procédure d'amendement.
4) A compter de 1998, les accusations de violence sexuelle sont intégrées dans les actes initiaux. Il existe des amendements qui élargissent les accusations de violence sexuelle ou les complètent, mais ces amendements ne les intègrent pas pour la première fois. Par exemple dans l'affaire NIYITEGEKA, son acte initial de 1996 l'accusait de viol et d'incitation aux violences sexuelles comme crime contre l'humanité, son amendement de 2000 est venu élargir les qualifications à celles de crime contre l'humanité pour autres actes inhumains et violation graves des conventions de Genève. La seule exception notable sur cette période est l'amendement de l'acte d'accusation de NDINDABAHAZI Emmanuel en juin 2001 pour y inclure le chef d'incitation au viol (crime contre l'humanité). Ceci démontre une maîtrise croissante des équipes du procureur dans l'enquête et la poursuite des crimes de violence sexuelle.
5) La baisse des incriminations pour violence sexuelle dans les actes initiaux à compter de 2001 est très nette et témoigne peut-être d'une baisse d'intérêt pour cette question.
Sur un plan global, nous observons donc depuis 1995, et surtout depuis 1998,que les actes des violences sont majoritairement intégrés dans les actes d'accusations initiaux. De ce fait, au 30 octobre 2002, le nombre d'actes initiaux qui impliquent les violences sexuelles est majoritaire, ce que confirme la figure 4 ci-dessous. Ce constat est une bonne nouvelle dans la mesure, où en général, les chefs d'accusation pour violence sexuelle ne sont pas retirés des actes initiaux par amendements[13]. Par conséquent, ce sont 30 individus qui à l'heure actuelle sont poursuivis ou jugés pour crime de violence sexuelle.
Bien que nous ne soyons pas au c?ur de la machine judiciaire, il est tout de même possible d'avancer quelques explications concernant ces différents phénomènes.
Bien que ces explications soient basées sur une appréhension extérieure des phénomènes et des situations conjoncturelles au sein du TPIR sur la base de sources de documentation officielles et journalistiques disponibles, nous pouvons néanmoins relever certains éléments d'explication qui pourraient éclairer les changements relatifs A) à l'augmentation des poursuites, B) au plafonnement du nombre des poursuites en matière de violence sexuelle, et C) à la chute du nombre des poursuites depuis l'année 2001.
Il existe plusieurs types d'explications aux phénomènes montrés dans les figures 1, 3 et 4 : elles sont soit de nature juridique, soit de nature structurelle ou encore de nature politique.
La première explication réside certainement dans l'impact de l'amendement pour violence sexuelle dans l'affaire Akayesu déposé par le procureur le 17 juin 1997 à l'invitation du juge Navatham Pillay, suite aux révélations des témoins[14] et au dépôt d'un mémoire d'amicus curiae rédigé par la Coalition d'ONG sur le droit des femmes en situation de conflits[15]. L'effet médiatique de cet amendement dans le monde des ONG comme dans les opinions publiques nationales a attiré l'attention de la communauté internationale sur cet aspect du génocide rwandais qui bien que non inconnu du tribunal n'avait pas réellement été explorée, et a exercé une pression importante sur le bureau du procureur et sur les enquêteurs[16].
Un an plus tard, lors du jugement Akayesu, les juges de la chambre I ont donné aux procureurs les outils juridiques leur permettant à la fois de définir les éléments constitutifs des crimes et de qualifier les différents actes de violence sexuelle en fonction des différentes catégories de crimes (génocide, crime contre l'humanité et violation grave de l'article 3 commun aux conventions de Genève et au Protocole additionnel II).
A la suite de l'amendement dans l'affaire Akayesu, plusieurs affaires, notamment celles qui ont fait partie des premiers actes d'accusation émis par le TPIR, ont fait l'objet d'amendements en vue d'inclure les violences sexuelles, et ceci jusqu'en 1999.
A compter de 1998, on observe que les violences sexuelles sont intégrées dans les actes initiaux et non plus par amendement pour toutes les poursuites engagées après 1998, ce qui prouve une sensibilisation accrue à cette question, la recherche effective de preuves et une meilleure maîtrise des outils juridiques sur cette question.
La seconde explication réside dans la prise de fonction d'un nouveau procureur en octobre 1996, la Canadienne Louise Arbour, et dans la réorientation de la stratégie du procureur à compter de 1997. Celle-ci visait à mettre l'accent sur certains crimes tels que l'entente en vue de commettre un génocide suite à l'aveu de culpabilité de Jean Kambanda ayant prouvé la mise en place d'une planification organisée du génocide au plus haut niveau de gouvernement ainsi que les crimes de violence sexuelle. Cette réorientation stratégique du procureur s'est traduite par la tenue d'un atelier sur les violences sexuelles organisé sous l'impulsion de Louise Arbour du 23 au 26 mars 1997, et dans la foulée par la création au sein de l'OTP (Bureau du procureur) d'une équipe d'enquête spécialement affectée aux crimes de violence sexuelle[17]. Durant l'année 1998-1999, les enquêtes sur les questions de l'entente en vue de commettre le génocide et les violences sexuelles sont demeurées la priorité[18]
Le travail du bureau du procureur sur les violences sexuelles a montré dans une étude de décembre 1998 "que des crimes sexuels ont été commis à grande échelle contre des femmes tutsis. À l'occasion de cette étude, qui a été menée dans sept préfectures du Rwanda, l'équipe chargée des enquêtes sur les crimes sexuels s'est entretenue avec 360 femmes qui auraient été victimes de viol. L'analyse des informations ainsi recueillies a permis au Procureur de conclure que ces crimes sexuels ont été planifiés et perpétrés de manière systématique et généralisée, et ce, avec la participation active des militaires, des Interahamwe et des autorités gouvernementales et administratives aux niveaux tant local que national"[19]. À la date du 23 septembre 1998, Louise Arbour affirmait dans le troisième rapport sur les activités du TPIR que l'équipe d'enquête avait recueilli quelques 85 témoignages relatifs aux violences sexuelles dont les auteurs présumés appartiennent à presque tous les groupes socioprofessionnels du Rwanda : armée, administration, clergé et médias [20]. De fait les équipes du procureur et notamment des enquêtes reçoivent en février 1999 un séminaire sur l'actualisation de la stratégie du procureur en matière de politique d'enquête, ce qui implique a priori la question des violences sexuelles[21]. En conséquence de quoi, les dossiers d'accusation s'ettofent avec l'augmentation du nombre de témoignages relatifs aux violences sexuelles[22].
A la suite de cette nouvelle stratégie et du travail de l'unité spéciale d'enquête sur les violences sexuelles, plusieurs actes d'accusation ont été amendés pour y inclure les crimes de violence sexuelle : NSENGIYUMVA, BAGOSORA, KABILIGI, NTABAKUZE, MUSEMA, BAGILISHEMA, NYIRAMASUHUKO Pauline.
Par ailleurs, à compter de 1998, les violences sexuelles sont désormais inclues dans les actes d'accusation initiaux, et les premiers actes d'accusation groupés comportant des actes de violence sexuelle font leur apparrition : notamment dans les affaires du groupe des politiciens du MRND et du groupe des ministres. Comme il l'a dèjà été souligné antérieurement, ce phénomène est à relier avec une plus grande sensibilisation du personnel du TPIR aux questions du genre et des crimes sexuels ainsi qu'au traitement des témoins appelés à la barre du TPIR.
Le dossier du procureur repose sur les témoignages et la solidité de ces témoignages. Cette affirmation du président du TPIR, la juge sud-africaine Navanethem Pillay, confirme l'importance cruciale du témoignage en général et de la présence du témoin à la barre[23]. Conscient de cette importance, le bureau du procureur a tenté de nouer des relations étroites avec les ONG de femmes au Rwanda et d'accroître la sensibilité du personnel du TPIR sur les questions liées au genre.
Il s'est donc tenu en octobre 1997 à Arusha, un séminaire sur les « agressions sexuelles » permettant ainsi aux ONG rwandaises participantes, aux experts internationaux, au représentant de la magistrature rwandaise et de l'OTP d'échanger leurs points de vue. La question du genre semble au cours de l'année 1997 prendre de plus en plus d'ampleur. Ainsi, un groupe chargé des questions de parité est mis en place au sein du greffe en juillet 1997 et une conseillère au genre (Françoise Ngendahayo) nommée. Le groupe sur la parité avait « pour objet de fournir des services consultatifs sur les questions liées à la dualité homme/femme au sein du Tribunal, ainsi que chez les victimes et les témoins »[24]. L'objectif avéré du groupe était de féminiser le recrutement du personnel du TPIR[25] et de nouer des relations étroites avec les ONG de femmes au Rwanda, ce qui a été effectivement réalisé selon les ONG rwandaises partenaires de la Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits.
A compter de mars 1997, la division d'aide et d'appui aux victimes et aux témoins, créée en juin 1996 au sein du greffe[26]. a été restructurée de manière à lui donner davantage de poids et à la rapprocher des témoins. Pour ce faire un sous-bureau fut ouvert à Kigali en juillet 1997[27]. Dans le prolongement de la politique du nouveau procureur Louise Arbour et du rapport de la Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits armés signalant les lacunes du système de protection des témoins[28], «le greffier a instauré, à côté de la Section d'aide aux victimes et aux témoins, le Groupe chargé des questions de parité et de l'assistance aux victimes. Son objet est surtout de contribuer, grâce à des services consultatifs, à ce que la situation des femmes soit mieux prise en considération dans les mesures adoptées pour protéger et soutenir les témoins cités devant le Tribunal»[29]. Une conseillère au genre et à l'assistance aux victimes est nommée en 1998, celle qui s'occupe de la parité au greffe assumera aussi cette fonction dans l'unité des témoins et des victimes. Sur le plan structurel et pour offrir une meilleure protection des témoins, la section d'aide aux victimes et aux témoins fut de nouveau restructurée en mars 2000 de façon à séparer les témoins de la défense des témoins de l'accusation[30].
Dans sa volonté d'associer les ONG locales à la justice du TPIR et dans la perspective de s'appuyer sur elles pour maintenir le lien avec les témoins et victimes de violence sexuelle identifiées par le Tribunal, le Groupe chargé des questions liées à la parité des sexes et à l'assistance aux victimes et aux témoins, a chargé en 1999 des organisations non gouvernementales opérant au Rwanda (dont HAGURUKA, AVEGA, Rwanda Women Network et son réseau social ASOFERWA, et Pro-femmes Twese Hamwe) de fournir aux témoins et victimes des services d'encadrement sur le plan juridique, des services de réadaptation psychologique et physique ou toutes autres formes d'assistance, notamment en matière de réinstallation[31] Ce programme, appelé «Programme d'aide aux témoins et aux témoins potentiels» visait par le biais des organisations locales, majoritairement mais non exclusivement, les femmes victimes de violence sexuelle[32]. Il a été mis en place sur la base de l'article 34 du statut du TPIR[33] sous l'impulsion de la conseillère au genre et à la protection des témoins en 1999. Il visait ainsi à apporter une réponse aux demandes des femmes témoins[34];. Le programme comportait donc plusieurs volets dont un volet médical (soins gynécologiques, médicaux et psychologiques) qui intervient à tous les stades de la procédure, un volet financier pour contribuer au relogement des femmes et de leur famille (notamment dans la commune de Taba) pour lutter contre la pauvreté dans une phase post-procès, et un volet de protection des témoins et de relocalisation. À Arusha, les femmes témoins bénéficiaient également des services d'assistance psychologique. Le projet mis en place par Françoise Ngendahayo fonctionna sans difficulté durant une année de 1999 à 2000, son budget fut revoté pour la deuxième année.
Il est donc réaliste de penser que l'arrivée d'un nouveau procureur et de son équipe, la réorientation de la politique du procureur, la réorganisation structurelle au sein de l'OTP et du greffe, et les séries de séminaires et de formation sur la question des violences sexuelles ont conduit à une augmentation de la poursuite des violences sexuelles dans les actes d'accusation. Cependant, ils n'expliquent pas le phénomène de plafonnement du nombre d'actes d'accusation que le graphe 2 a mis en évidence. Aussi, convient-il de s'attacher à comprendre ce phénomène.
Les explications concernant le phénomène de plafonnement des poursuites en matière de violence sexuelle résident dans l'architecture théorique du TPIR et de la conception accusatoire du rôle de la poursuite qui fait du témoignage le n?ud gordien du travail du procureur à la fois par son impérieuse nécessité pour monter les dossiers à charge et ses difficultés pour trouver les témoins[35].
« Les déclarations de témoins sont la pierre angulaire sur laquelle l'accusation fonde directement son argumentation. » écrivait le président du TPIR dans son cinquième rapport annuel sur les activités du TPIR à l'automne 2000 [36]
La poursuite doit donc trouver des preuves des violences sexuelles, mais pour ce faire, faut-il encore que les crimes dont on doit apporter la preuve aient bien été commis. Objectivement, tous les coupables n'ont pas systématiquement commis des actes de violence sexuelle, ni même encouragé à les commettre. Par ailleurs, s'il apparaît évident que les violences sexuelles ont fait partie du modèle génocidaire, les preuves sur lesquelles les procureurs rédigent leur acte d'accusation sont parfois soit indisponibles, soit insuffisantes. Il est ainsi remarquable que seulement 1/6ème des témoignages recueillis par les équipes d'enquêtes concernent les actes de violence sexuelle.
De plus, on observe que d'une année sur l'autre le nombre de témoignages récoltés sur cette question, et ceci malgré la création d'une équipe d'enquête spécialisée en cette matière, n'a pas augmenté de manière considérable. Par exemple, dans le quatrième rapport sur les activités du TPIR pour la période 1998-1999, le président du TPIR rapportait que 85 des 328 déclarations de témoins recueillis par les enquêteurs concernaient les crimes sexuels[37], tandis que durant l'année 1999-2000 le nombre de déclarations relatives aux violences sexuelles était de 113 sur un nombre total de 600 déclarations de témoins[38].
Il existe donc très nettement une disproportion croissante en matière de recueil de témoignages sur les violences sexuelles d'une année sur l'autre. Cette disproportion illustre la difficulté que la section spécialisée des enquêtes rencontre dans le recueil de preuves et de témoignages en matière de violences sexuelles, sans compter que ces difficultés coïncident avec un changement de procureur en août 1999.
Ces difficultés ont plusieurs explications qui relèvent à la fois de la difficulté de trouver des témoins qui acceptent de venir à la barre, du doute qui anime les ONG de femmes et les femmes victimes quant à la capacité réelle du Tribunal de poursuivre les violences sexuelles, et enfin de l'existence d'une variété d'obstacles logistiques et humains qui entravent considérablement le travail des procureurs.
Certaines de ces difficultés sont dues à la disparition des témoins par décès, déménagement ou délocalisation forcée des témoins en raison des attaques dans les camps de réfugiés ou de situation de conflits armés dans les pays où les témoins ont trouvé refuge[39]. Certaines victimes atteintes du SIDA sont également dans l'incapacité de témoigner devant le TPIR en raison de leur mauvais état de santé ou de leur hospitalisation[40].
De plus, il existe, sur le plan culturel un tabou très fort sur la question des violences sexuelles dans cette partie du monde. Certaines femmes qui ont réussi à se réinsérer dans la vie sociale, familiale et professionnelle ne souhaitent pas témoigner à la barre du TPIR de peur d'être stigmatisées et rejetées[41]. Il est tout à fait parlant par exemple que bien que les membres du bureau de Louise Arbour se soient entretenus en décembre 1998 avec 360 femmes victimes de violence sexuelle, seulement 85 déclarations de témoins ont été recueillies par les enquêteurs[42].
Enfin les mauvaises expériences des femmes en matière de témoignage sur les violences sexuelles tant du point de vue de l'absence de prise en charge psychologique, de l'absence de préparation au témoignage et surtout au contre-interrogatoire, de l'absence d'accompagnement psychologique et financier que de l'inefficacité des mesures d'anonymat ou de discrétion qui accroissent les risques encourus (menace de mort, attentat) par les témoins lors de leur retour au pays[43] sont autant de facteurs dissuasifs.
Une certaine méfiance existe donc vis à vis de ce tribunal situé en Tanzanie, qui dispose de moyens considérables aux yeux de la population rwandaise, traite les accusés selon des standards de justice qui les maintiennent dans leur statut de privilégiés et se dit incompétent pour indemniser les victimes[44]. De plus, les femmes victimes de violence sexuelle durant le génocide ont des besoins immédiats qui ne sont pas ceux de la justice ou de la reconnaissance de ces crimes, bien que cette préoccupation soit une des leurs, mais de l'ordre de la subsistance, du logement, de la scolarisation et des soins médicaux[45]. C'est d'ailleurs un message qui avait été entendu par le bureau du procureur et la conseillère aux questions du genre puisque le TPIR a coopéré en 1999 et 2000 avec les ONG locales pour mettre en place le programme de support aux victimes et témoins. Il reste cependant que pour les raisons exposées ultérieurement, ce programme n'a pas emporté l'adhésion totale des victimes et des ONG de femmes et finalement le Tribunal pénal international pour le Rwanda avait peu à offrir dans la balance du calcul coût/avantage. Cependant, les difficultés rencontrées par le Tribunal ne se sont pas arrêtées là. Elles concernent également un aspect juridique qui est celui de sa capacité à poursuivre et à condamner les crimes de violence sexuelle.
L'autre difficulté qu'a rencontré le bureau de Louise Arbour provient de l'action juridique et de ce qui a été perçue par les associations de femmes comme une incapacité de la part du TPIR à poursuivre et à condamner efficacement les violences sexuelles. Les ONG de défense, comme les ONG de femmes et de femmes victimes ont connu une série de déception quant au travail effectué par le TPIR sur cette question.
Première déception : l'absence de réaction des juges dans l'affaire RUZIDANA lorsqu'à l'automne 1997 les témoins évoquent les violences sexuelles. Dans un contexte qui intervenait peu de temps après un cas d'apparence similaire (Akayesu), les ONG de femmes ainsi que les femmes victimes étaient en droit de s'attendre, au moment où dans une autre chambre les femmes témoignaient à charge pour la première fois sur les violences sexuelles dans le procès Akayesu[46], à ce que les juges (William Sekule, Yakov Ostrovsky et Hossein Khan) dans l'affaire RUZINDANA suspendent le procès et demandent à la poursuite un complément d'enquête sur les allégations de violences sexuelles[47]. Or les juges sont restées de marbre sur cette question et le précédent Akayesu n'a pas entraîné de réaction judiciaire.
Deuxième sujet d'insatisfaction : il aura fallu attendre dans deux affaires (AKAYESU et MUSEMA[48]) que les victimes évoquent en cours de procès les actes de violence sexuelle pour que les procureurs décident (sous une certaine pression) d'amender les actes d'accusations pour y inclure de nouveaux chefs d'inculpation visant les actes dénoncés par les témoins. Sans elles, les victimes témoins et la pression des ONG, les actes d'accusation auraient-ils été amendés ?
Troisième déception, c'est le choix de la part du procureur de ne pas (enquêter?) poursuivre les accusés pour violence sexuelle alors que ceux-ci ont été dénoncés par les victimes et les témoins ou que les violences commises ont été documentées par les ONG de femmes au Rwanda. Par exemple, le rapport d'AVEGA rapporte que les accusés KANYABASHI Joseph et NDAYAMBAJE Élie connus des ONG pour avoir planifier les actes de violence sexuelle dans la préfecture de Butare[49] n'en sont pas accusés, ni dans leurs actes initiaux de 1996, ni dans les amendements de 1999[50].
Qui plus est, dans certaines affaires des éléments de preuve relatifs aux violences sexuelles sont sciemment gardés sous silence par la poursuite selon une stratégie définie par le procureur. Dans l'affaire CYANGUGU, il était devenu évident avant le début du procès, que la stratégie du procureur était à ne pas faire état des éléments de preuve relatifs aux violences sexuelles que le bureau du procureur possédaient, ce qui a amené les procureurs à ne pas déposer l'amendement rédigé contre deux des trois accusés : Bagambiki, Imanishimwe. De ce fait, lorsque les témoins ont laissé échapper les allégations de violence sexuelle durant le procès en octobre et novembre 2000, et que la Coalition des femmes en situation de conflits armés tenta en mars 2001 de faire amender l'acte d'accusation[51], les violences sexuelles restèrent en dehors du débat, qui préféra s'orienter sur des questions de procédure[52].
La quatrième erreur, c'est sans aucun doute le retrait du chef d'accusation de viol dans l'affaire SHERUSHAGO en échange de sa coopération avec le Tribunal dans le cadre de son plaidoyer de culpabilité en octobre 1998. Omar SHERUSHAGO était accusé de crimes contre l'humanité pour assassinat, extermination, torture et viol. Le fait que le viol ait été rayé de son acte d'accusation de préférence aux autres chefs donne l'impression aux femmes victimes et aux associations de femmes que les crimes de violence sexuelle ne sont pas traités selon le même degré de gravité et d'importance que les autres crimes[53].
Cinquièmement, la politique du procureur en matière de procès collectif conduit celui-ci à demander des jonctions d'instances ou bien à émettre des actes d'accusation conjoints dans le but de rationaliser l'utilisation des procédures judiciaires, d'éviter aux témoins la répétition des dépositions dans plusieurs procès et de faciliter la preuve de l'entente pour génocide[54]. Cette politique a abouti en 1999-2000 au regroupement des accusés dans quatre procès collectifs majeurs : Dossier de BUTARE, Dossier de CYANGUGU, Dossier des MILITAIRES et Dossier des MÉDIAS. Dans deux de ces quatre dossiers (MÉDIAS et CYANGUGU), les actes d'accusation ne font pas état des violences sexuelles alors que les témoins les ont clairement évoquées à plusieurs reprises, et que dans le cas de Cyangugu, la question de l'amendement des actes d'accusation contre deux des trois accusés a été débattue à plusieurs reprises. On serait donc facilement enclin à croire que sous l'impulsion du nouveau procureur (Carla del Ponte a pris ses fonctions en août 1999), et en dépit de ses affirmations contraires, la politique du procureur tend à privilégier la tenue de procès collectif au profit de la preuve « d'entente en vue de commettre le génocide » au détriment de la poursuite des violences sexuelles[55]. A ces difficultés juridiques s'ajoutent des difficultés logistiques et humaines, de nature structurelle.
Sur un plan plus général, il se peut que malgré tous les efforts et la bonne volonté du procureur, la poursuite et la condamnation des violences sexuelles ait été entravée par un certain nombre d'obstacles logistiques et humains qui sont les suivant:
- le manque récurrent de personnel et un roulement important, ce qui accroît la difficulté de recruter du personnel spécialisé sur les questions du genre;
- l'absence de moyens technologiques en nombre suffisant (ordinateurs, numérisation des archives judiciaires, accès à des bases de données électroniques : Westlaw, Lawtel, Proquest), ce qui freine la rédaction des actes d'accusation[56];
- la présence d'anciens participants au génocide dans les équipes d'enquêteurs du TPIR qui mine la confiance des témoins;
- les difficultés en matière d'indexation, d'archivage et d'administration des éléments de preuves ce qui a sans doute causé la perte de certaines d'entre elles[57];
- le nombre important de témoignages et la nécessité de les traduire, ce qui retarde le traitement des dossiers à charge[58];
- la baisse de fiabilité des témoignages bien des années après la commission des faits allégués, ce qui gêne la démonstration de la preuve[59];
- une certaine résistance du personnel aux questions du genre et au traitement des violences sexuelles en dépit de la sensibilisation sur ce thème[60],
- sans compter les relations parfois difficiles entre les services du TPIR (il y aurait eut des difficultés de coordination et des conflits de compétence entre la section de l'aide aux victimes et aux des témoins du greffe et l'équipe chargée de l'encadrement des témoins au sein de la section d'enquête du bureau du procureur.[61]).
Ces éléments sont autant facteurs qui expliquent que la poursuite des violences sexuelles a connu un succès réel, mais mitigé durant la période 1996-2000. Si certains problèmes ont été résolus (notamment tous ceux ayant trait à l'informatique et à la logistique), d'autres se sont considérablement accrus durant les années 2001-2002, ce qui s'est traduit par une baisse spectaculaire de l'incrimination des violences sexuelles dans les actes d'accusation durant cette dernière période
Ce constat est le résultat d'une conjonction d'évènements et de réformes qui ont suivi la prise de fonction de la procureur suisse Carla del Ponte en août 1999. L'arrivée de Carla del Ponte a en effet été accompagnée d'un certain nombre de mesures de rationalisation du travail des enquêteurs et des procureurs, de restructuration du bureau du procureur et de réorientation de la politique en matière de poursuite qui ont produit leurs effets à compter de 2000. En dehors de ces transformations internes, l'année 2002 est celle qui voit les relations entre le TPIR et le Rwanda s'envenimer à nouveau. La volonté d'étendre l'activité judiciaire du Tribunal aux actes commis par les militaires de l'APR lors de la prise de pouvoir durant 1994 ainsi que la discussion sur l'extension de la compétence temporelle et ratione loci du TPIR aux actes commis par des citoyens rwandais en territoires burundais et congolais après 1994 qui auraient pour effet de menacer certains membres du gouvernement FPR actuel, ne sont certainement pas des données étrangères à cette querelle[62]. Du point de vue des ONG rwandaises, la méfiance atténuée mais perceptible à l'égard du Tribunal du temps de Louise Arbour, s'est accentuée en raison des nouvelles orientations et des derniers résultats judiciaires.
À son arrivée au poste de procureur en chef, Carla del Ponte a fait preuve de beaucoup d'ambition en annonçant son plan d'action pour les prochaines années de fonctionnement du TPIR. Elle annonçait ainsi son intention de poursuivre 136 nouveaux suspects d'ici à 2005[63]. La mise en ?uvre de ce nouveau programme a conduit à l'adoption d'un plan de restructuration du bureau du procureur, de rationalisation des ressources et de réorientation de la politique de poursuite qui n'a pas été sans conséquences sur l'incrimination des violences sexuelles au moment même où la cohorte des juges au TPIR se féminise[64].
La section des enquêtes a été totalement réorganisée et l'équipe d'enquêteurs affectés aux violences sexuelles et basée à Kigali a été démantelée[65]. Certains de ses membres ont été réaffectées dans les équipes d'enquête qui sont désormais composées d'un conseiller juridique, d'un analyste criminel, d'un spécialiste des violences sexuelles, d'un assistant de langue et d'un secrétaire. Cependant un noyau dur continuerait d'assurer la coordination et la supervision des opérations. Mais l'accent est désormais mis sur la recherche des criminels qui ont trouvé refuge à l'étranger avec la constitution d'une équipe d'enquêteurs spécialement affectés à cette tâche[66] et la mise en place avec l'aide du gouvernement des États-Unis du programme "Rewards for war crimes Information (Programme de récompense pour informations concernant les crimes de guerre)"[67]. La poursuite de ex-FAR et Interawme réfugiés dans la province du Kivu au Congo serait, aux dires de certains, également du champ de compétence de la toute nouvelle équipe spéciale d'enquête[68], ainsi dénommée pour sa capacité à changer de "spécialité" en fonction des priorités définies.
Sept procureurs ont été limogés en mai 2001 pour incompétence[69] et le contrat du procureur adjoint en chef Bernard Muna n'a pas été renouvelé. Il a été remplacé par Ken Fleming. Les nouveaux procureurs prirent leurs fonctions en septembre 2001, ce qui a bien entendu causé une perte de temps. Le poste de procureur adjoint est semble t-il toujours vacant depuis plus d'un an et demi ce qui n'est pas sans conséquences sur la bonne marche du bureau du procureur à Kigali puisque désormais une équipe de sept conseillers juridiques y est chargée de rédiger les projets d'actes d'accusation sous la houlette de procureur adjoint[70]. D'autre part le personnel du greffe a été également remplacé, le greffier Okali a laissé la place au sénégalais Adama Dieng en mars 2001, et octobre 2001 voit l'arrivée d'un nouveau greffier adjoint. Le contrat de Françoise Ngendahayo, la conseillère au genre du TPIR, n'a pas été renouvelé en août 2001[71].
D'autre part, le procureur en 2001-2002, pressée par les difficultés de recrutement, et les critiques internationales sur la lenteur des procédures a d'une part réduit considérablement ses ambitions en matière de poursuite[72] et d'autre part décider de tout mettre en ?uvre pour accélérer les procédures. Là aussi, la rationalisation des actes de procédure et la réduction des délais sont au programme.
De nouvelles formules permettant de réduire le champ du litige lors du procès et d'accélérer les procédures sont étudiées[73]. En pratique que cela signifie t-il ? Il est possible de trouver la réponse à cette question au § 41 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001) : « Certains procès ne durent que quelques mois, lorsque par exemple, la défense admet volontiers les points de fait ou de droit afin de circonscrire le champ du litige. » Il y a dans ce cas tout lieu de craindre des difficultés en matière d'incrimination pour violence sexuelle dans les prochains actes d'accusation. Car s'il demeure un point sur lequel les accusés ont toujours refusé de plaider coupable alors qu'ils reconnaissaient leur implication dans d'autres crimes, c'est bien la question des violences sexuelles. Point de contestation important, la preuve des violences sexuelles risque de donner lieu à une augmentation des questions préjudicielles sur cet aspect, une pratique que le Tribunal tente de juguler, aussi bien au niveau du bureau du procureur dans une phase pré-procédurale, qu'au niveau des juges dans la phase de plaidoirie[74].
Par conséquent, il est à prévoir que les violences sexuelles seront à l'avenir un enjeu plus important qu'autrefois car il relève du choix stratégique de l'accusation dans un contexte de contraintes temporelles, financières et politiques. Cette inquiétude se vérifie, car depuis février 2001, seulement six des quinze actes d'accusations émis par l'équipe du nouveau procureur comportent des accusations de violence sexuelle, contre six sur six en 2000. Elle est d'ailleurs renforcée par le fait que parmi les neuf autres acte d'accusation, trois d'entre eux concernent des accusés connus et dénoncés par l'ONG rwandaise AVEGA-Aghorozo comme ayant planifié les violences contre les femmes dans la PVK[75] mais non poursuivis pour ce type de crimes. Il s'agit de Tharcisse REHENZAHO inculpé en novembre 2002, de François KARERA inculpé en juin 2001, et de Léonidas RUSATIRA inculpé en mai 2002 mais contre lequel les poursuites ont été abandonnées par le procureur en août de la même année.
Autres mots d'ordre : professionnalisme et précision. Désormais, les actes d'accusation devront être précis et parfaitement étayés : l'accusation ne sera retenue que si la preuve est parfaitement probante[76]. Les cas poursuivis seront soigneusement choisis, les autres cas délégués aux juridictions internes[77]. Se juxtapose à cela, la volonté très ferme de Carla del Ponte et des membres du Tribunal en général d'éviter au maximum ce qui s'est produit durant les années 1997-1999, à savoir la multiplication des amendements aux actes d'accusation. A ce titre l'échec de la tentative de la "Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits" d'amender l'acte d'accusation dans le procès Cyangugu n'est certainement pas étrangère à la nouvelle politique du Tribunal. L'exigence de professionnalisme et de concision tend précisément à éviter les délais supplémentaires causés par la mise en état des dossiers, la modification des actes d'accusation et la ribambelle d'actes de procédure et d'appels interlocutoires que génère une telle intervention. Il y donc tout lieu de croire que les actes d'accusations "nouvelle version" produits durant l'année 2001 et 2002 seront peu sujets à amendements. Or peu d'entre eux font état de violences sexuelles[78]. On ne peut encore préjuger des conséquences de cette politique sur la poursuite des violences sexuelles, mais la volonté très nette du Tribunal (juges, greffe et poursuite) de vouloir accélérer à tout prix les procédures nous incite à questionner la pérennité du travail entrepris dans les années 1997-2000. Ce tournant est préoccupant dans un contexte où les résultats de l'activité judiciaire du TPIR en matière de violence sexuelle sont décevants.
La question est d'autant plus sensible que l'évolution de la jurisprudence en ce domaine au cours des deux dernières années porte un coup certain à la crédibilité des dossiers montés par l'accusation. En effet, pour la première fois en 2001, la Cour d'appel est revenue sur le jugement de culpabilité d'Alfred MUSEMA en rayant l'inculpation de viol à la suite de l'audition de deux témoins à décharge qui n'avaient pas été entendus en première instance[79]. De plus en juin 2001, Ignace BAGILISHEMA, accusé en autre de viols (violation grave de l'article3 commun aux Conventions de Genève et au Protocole additionnel II) a été acquitté de tous les chefs d'accusation et libéré. La Cour d'appel a confirmé l'acquittement en juillet de cette année. Enfin en août 2002, la poursuite demande le retrait complet de l'acte d'accusation contre RUSATIRA Léonidas. Ces développements particulièrement fâcheux, en particulier sur la question des crimes sexuels questionnent plus que jamais la capacité réelle du tribunal et des juges à condamner effectivement les accusés pour les violences sexuelles qu'ils ont commis. Les résultats du travail de la poursuite en ce domaine sont plus que décourageants comme l'illustre le graphe suivant :
Sur les onze affaires jugées par les juges, huit ont abouti à une condamnation, une à un acquittement et deux n'ont pas donné lieu à un jugement car le procureur a décidé de retirer les actes d'accusation. En tout et pour tout sur ces onze affaires, seuls quatre actes d'accusation comportaient des incriminations pour violence sexuelles. L'une de ces accusations a été retirée par la poursuite dans le cadre d'un plaidoyer de culpabilité et n'a donc pas donné lieu à un jugement (Omar SHERUSHAGO). Dans deux autres dossiers les individus accusés de violence sexuelle ont été acquittés ainsi que mentionné au paragraphe précédent. (Ignace BAGILISHEMA, Alfred MUSEMA). Dans cette dernière affaire, la culpabilité de Musema pour les autres accusations a été maintenue. Par conséquent sur les onze affaires présentées en chambre, seule une a donné lieu à une condamnation pour violence sexuelle (AKAYESU). On peut donc supposer que ces résultats aient quelque peu entamer la volonté du procureur del Ponte de maintenir les violences sexuelles au rang de priorité ou tout au moins l'encouragent à davantage de prudence quant à l'incrimination des violences sexuelles en ne privilégiant que des dossiers dans les quels la preuve sera "garantie".
Le graphe 5 ci-dessus met donc en évidence le double fait que l'activité judiciaire décline sans cesse depuis l'année 2000, et qu'aucun jugement n'a donné lieu à une condamnation pour violence sexuelle depuis le 2 octobre 1998. Le Tribunal aurait fait face à des conflits d'intérêts entre services et de personnalité durant l'année 2000 qui ont semble t-il contribué à en ralentir le travail[80]. Il est à espérer pour la légitimité du tribunal que les mois à venir verront l'année 2002 se clore sur l'annonce de jugements dans les affaires SEMANZA, NTAKIRUTIMANA père et fils avec des condamnations pour violence sexuelle pour Semanza[81]. Le jugement dans l'affaire NIYITEGEKA particulièrement intéressant pour les qualifications retenues en matière de violence sexuelle[82] devra encore attendre mars 2003. On peut effectivement comprendre qu'au constat de résultats si peu encourageants, tant du point de vue des perspectives d'incrimination des violences sexuelles dans les futurs actes d'accusation que du point de vue des perspectives d'amendements et de condamnations, les ONG de femmes et de victimes aient peu confiance dans la capacité du tribunal à instruite et condamner de manière effective les violences sexuelles commises durant le génocide.
Les années 2001 et 2002 ont été marquées par une série de maladresses et de difficultés qui ont abouti à empoisonner les relations entre TPIR et le Rwanda, et à miner très sérieusement la confiance des témoins, des victimes et des ONG rwandaises vis à vis du TPIR. En mars 2002, les ONG du Rwanda dont des ONG de femmes et de victimes ainsi que le gouvernement rwandais ont décidé de ne plus coopérer avec le TPIR, freinant ainsi du même coup le déroulement des audiences et compliquant le travail de la poursuite et de la défense.
Cette inadéquation se manifeste de deux façons. En premier lieu la réorientation du programme a conduit l'abandon du volet social qui répondait pourtant aux besoins exprimés par les victimes et relayés par les ONG rwandaises, et en second lieu le volet médical applicable est inadapté à la réalité des rwandais puisque l'aide psychologique offerte aux victimes de violences sexuelle l'aurait été en Swahili et non en Kinyarwandais[83]. Par ailleurs, il semblerait que le programme de protection des témoins manque parfois d'efficacité et que des témoins auraient été victimes de harcèlement, d'intimidation, voir de tentative de meurtres. Ces incidents sont régulièrement dénoncés par les ONG locales et internationales depuis 1996[84].
Certes, la question des violences sexuelles est annoncée comme étant toujours importante[85], et le procureur a créé à cet effet une équipe de gestion des témoins chargée de garder le contact avec eux et de répondre à leurs besoins[86]. Malheureusement cette équipe intervient à un moment où le « programme d'aide aux témoins et aux témoins potentiels » dirigé par la conseillère au genre F. Ngendahayo est contesté et remis en question.
À l'automne 2000, l'avocat canadien de J-P Akayesu en appel met sérieusement en cause la poursuite du projet en questionnant l'impartialité du tribunal sur la question du choix des témoins-victimes de la poursuite financés par ce programme dans la région de Taba (lieu des crimes de J-P. Akayesu), et une association des avocats de la défense demande l'annulation du programme[87]. Les critiques des avocats mettent en cause la compétence légale du tribunal à mener un programme de justice réparatrice dans une commune où des crimes commis par l'accusé sont en cours d'appel, ce qui tendrait ainsi selon eux à préjuger définitivement de la culpabilité de l'accusé et à miner la nécessaire impartialité du Tribunal. Suite au départ de l'ancien greffier Okali et après discussions au sein du TPIR, le programme est réorienté et réduit : le volet financier du relogement, de l'aide au développement et de réconciliation est abandonné[88], le contrat de Françoise Ngendahayo n'est pas renouvelé. Les relations entre les victimes et le personnel du TPIR se refroidissent, l'unité des témoins et victimes du greffe est accusée d'insensibilité sur la question des violences sexuelles. Ceci intervient dans un contexte où non seulement les femmes ne bénéficient plus d'une reconnaissance et d'un accompagnement financier (qui n'est pas une réparation) de la part du TPIR via le programme d'aide aux témoins et aux témoins potentiels, mais dans le cadre de l'annonce officielle et certaine que le TPIR n'est pas à même de compenser les victimes.
« Many Rwandans have questioned the ICTR's value and its role in promoting reconciliation where claim for compensation in not addressed. For every hour of every day over the past 71/2 years, we have lived with the voices of survivors of genocide and so we strongly urge the United Nations to provide compensation to Rwandans victims, » Navanethem Pillay, Pésident du TPIR, 28 octobre 2002[89].
L'annonce officielle faite par les juges du TPIR en 2000 de l'incapacité du Tribunal à indemniser les victimes a semble t-il mis un point final à la question des réparations des victimes devant le TPIR. Bien que la décision des juges ne puisse qu'aller dans ce sens puisque les articles 105 et 106 des règles de preuve et de procédure du TPIR confient la question de l'indemnisation et de la restitution des biens aux tribunaux nationaux, l'annonce officielle faite par les juges est venue mettre un terme aux espoirs de la population rwandaise de voir un jour leurs souffrances indemnisées par le biais d'un processus judiciaire quelconque[90].
Pendant longtemps, la juge Navanathem Pillay, et dernièrement encore la procureur Carla del Ponte ont entretenu l'espoir d'une possible indemnisation par la communauté internationale[91]. Mais à plusieurs reprises, malgré des déclarations publiques, la juge Navanathem Pillay a du faire marche arrière en reconnaissant l'incompétence du Tribunal dans le traitement et l'appréciation des demandes en réparation de préjudice[92]. En reléguant la question au Conseil de Sécurité[93], les juges, qui de doute façon n'ont pas les moyens financiers de leur action quand bien ils seraient dotés des moyens juridiques en amendant les règles de procédure, se sont déchargés de leur responsabilité sur la communauté internationale, espérant peut-être une mobilisation forte des ONG sur cette question.
Une réunion aurait eu lieu à Kigali le 1er mars 2002 entre les représentants des gouvernements des pays donateurs et ceux des organismes des Nations Unies. Si l'indemnisation a lieu un jour, il est plus que probable que celle-ci passe par le financement de projets de développement, d'éducation, et de santé qui de toute façon entrent dans le cadre de l'aide traditionnelle au développement[94]. Le détachement de la question de l'indemnisation des victimes de l'exercice de l'activité judiciaire du TPIR questionne la validité et l'utilité pour les Rwandais d'une justice pénale qui peut condamner mais non compenser ou réparer. Le but de la justice pénale n'est-il que de dissuader et punir, et non de réparer.? Cet élément contribue à mon sens à éloigner la juridiction d'Arusha des justiciables pour le compte desquels, elle prétend rendre justice[95]. Autre motif d'éloignement et de suspicion, ce sont les scandales qui secouent le TPI.
Au cours des années 2001-2002, des révélations très néfastes pour le Tribunal ont taché la réputation et la compétence des équipes d'enquêteurs bien que les enquêteurs en question soient des contractuels employés par les avocats de la défense. Certes, ils ne sont pas des membres du personnel mais ils sont rémunérés sur les frais alloués par la communauté internationale aux accusés indigents[96]. Aussi, il ne fait pas de doute que l'inculpation des enquêteurs de la défense Siméon Nshamihigo[97] et Joseph Nzabirinda, en juin et août 2001 ainsi que le non-renouvellement ou la suspension des contrats de quatre autres enquêteurs de la défense en juillet 2001 après qu'une enquête eu révélé qu'ils figuraient sur la liste des génocidaires de catégorie 1 au Rwanda[98] ont considérablement miné la crédibilité du Tribunal auprès du public et servit d'arguments pour envenimer des relations déjà fragiles avec le gouvernement rwandais.
Les anciens enquêteurs, dont l'un est accusé de viols, ont tous deux travaillé sur les dossiers d'accusés en cours de jugement dans lesquels les violences sexuelles ont été évoquées mais non retenues ou discutées (Samuel Imanishimwe du dossier de CYANGUGU, Sylvain Nsabimana du dossier de BUTARE)[99]. Qui plus est, Siméon Nsahimihigo est recherché par le gouvernement rwandais depuis 1996 comme l'un des planificateurs du génocide dans la commune de Cyangugu, là où précisément opéraient les accusés de l'affaire Cyangugu. Quant à Joseph Nzabirinda, accusé de viol, il est le complice de Joseph Kanyabashi, actuellement jugé pour les crimes commis dans la commune de Gnoma. Finalement, c'est la procédure engagée par le procureur rwandais Gahima qui a finalement incité en mai 2001 Carla del Ponte et le responsable en chef des équipes d'enquêtes (Laurent Walpen) à entreprendre des actions contre ce criminel.
Les suspicions envers le TPIR qui abriterait en son sein des anciens génocidaires liés aux accusés aujourd'hui traduits en justice ne se limitent malheureusement pas à ces quelques cas. En effet, des traducteurs[100] et d'autres enquêteurs de la défense semblent être mis sur la sellette[101]. Par conséquent, non seulement, ces incidents minent la crédibilité du Tribunal car ces enquêteurs se font parfois passer pour des enquêteurs de la défense[102], mais ils sapent surtout la possibilité de rendre une justice impartiale et proche de la vérité. Les possibles manipulation et la dissimulation de preuve, les tentatives de subornation de témoins, les pressions aux fins de retrait de témoignages, le contournement des règles d'anonymat et de protection des témoins intimident et menacent les témoins[103] et donnent corps aux critiques vis à vis de cette justice internationale éloignée, imparfaite et non fiable. Ceci est d'autant plus inquiétant que la démonstration de l'inefficacité des mesures de protection et d'anonymat des témoins, notamment des témoins à charge intervient à un moment où des négociations sont menées pour rapatrier des anciens membres des FAR (Force Armée Rwandaise) et de l'Interamwe combattant dans la région du Kivu au Congo. Le retour de ces anciens criminels, et participants au génocide fait peser sur les témoins des risques potentiels importants[104].
Par ailleurs, autre type de scandales qui ont récemment secoué le Tribunal, ce sont les allégations d'atteinte à la dignité des témoins victimes de viol durant le procès de BUTARE. Bien que démenties par la présidente Pillay, ces accusations relayées par la presse[105] qui mettaient en cause autant l'éthique des avocats de la défense, notamment en ce qui avait trait aux techniques de contre-interrogatoire de témoins, que le comportement des juges et leur incapacité à contrôler le bon déroulement du procès[106], ont servi par la suite à alimenter le discours selon lequel le TPIR mépriserait les victimes du génocide.
Bien que sans rapport direct avec la question des violences sexuelles, le tribunal au cours de cette année a également été désigné du doigt pour un certain nombre d'abus dans l'utilisation des honoraires versés aux accusés indigents dans le cadre de l'aide juridictionnelle[107]. Ces honoraires auraient été partagés avec les accusés et un système d'échanges de services et de cadeaux avait lieu dans les quartiers pénitenciers d'Arusha. Ces éléments n'ont pas manqué d'exacerber les ranc?urs et les accusations d'incompétence, de laxisme et de mauvaise gestion[108].
Ces révélations ont conduit les associations AVEGA et IBUKA à annoncer en janvier 2002, la cessation de toute coopération avec le TPIR et leur décision de ne plus envoyer de témoins au TPIR[109]. Cette décision, appuyée par le gouvernement rwandais[110], a obligé les juges à ajourner à plusieurs reprises les audiences des procès en cours, notamment dans les dossiers de BUTARE, KAJELIJELI, NIYITEGEKA et SEMANZA. Seuls quatre des onze témoins prévus lors de la quatrième phase du procès de Butare ont complété leur témoignage devant la Cour, deux ne sont pas venus au procès de Kajelijeli, 14 témoins à charge n'ont pas pu se présenter dans l'affaire Niyitegeka et cinq des six prévus ne se sont pas présentés à la barre dans l'affaire Semanza. Le refus des témoins de venir témoigner et l'impossibilité pour eux d'obtenir des documents de voyage délivrés ont obligé la poursuite à rayer ces témoins de sa liste dans au moins deux affaires[111] et Navanethem Pillay à saisir le Conseil de sécurité pour rappeler au Rwanda son obligation de coopérer avec le TPIR[112].
Quels que soient les motifs réels de la décision du gouvernement rwandais[113], elle a non seulement ralenti le travail du Tribunal mais elle a également fait entrer le Tribunal dans un inutile et contre-productif bras de fer[114] qui entame sérieusement la réputation du Tribunal auprès de la population rwandaise et menace éventuellement[115] la pérennité du Tribunal. La légitimité du Tribunal risque fort d'être remise en cause dès lors que les moyens de son mandat[116] qui est de rendre des jugements lui font défaut pour cause de non-coopération avec le pays dans lequel se trouvent la majorité des témoins à charge sur lesquels repose l'accusation[117]. Le Tribunal fait face depuis le printemps dernier à une crise juridico-politique majeure qui risque d'avoir des conséquences désastreuses dans l'avenir. Une crise d'autant plus importante que le gouvernement rwandais et les rwandais ont décidé d'investir les prétoires nationaux et de jouer la carte d'une justice parallèle de préférence à une justice complémentaire.
Dans ce processus de réconciliation nationale, la justice apparaît comme un élément fondamental : « However, it is pertinent to the reconciliation process that Rwandese feel that justice is being done. There can be no reconciliation without justice.[118] ». Conséquemment, les autorités ont pris des dispositions législatives à la suite du génocide (loi organique 08/96 du 30 août 1996) et institutionnelles pour atteindre leur objectif[119]. Au titre de ces dernières initiatives, figure la mise en place des juridictions Gacaca. Bien que critiquées pour ses défauts et les risques associés à cette forme de justice participative "traditionnelle"[120] par les rescapés du génocide comme les juristes, le gouvernement a décidé face à l'ampleur de la tâche judiciaire qu'il s'est imposé de poursuivre dans le sens des procès Gacaca.
D'inspiration traditionnelle, les procès gacaca auraient l'avantage d'impliquer la population locale dans le jugement et la condamnation de certains criminels pour les crimes commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 en complément de l'action des institutions judiciaires étatiques chargées de juger les criminels les plus importants[121]. Cette méthode conduirait ainsi à liquider plus rapidement une série de contentieux et éventuellement à solidifier le processus de réconciliation nationale[122]. Il apparaît que le gouvernement Rwandais s'est engagé assez fortement depuis l'année 2000 dans le sens d'un traitement national des participants au génocide en associant étroitement les ONG locales au processus de réconciliation (certaines femmes responsables des ONG de femmes et de rescapés du génocide ont été nommées à des postes clés dans la fonction publique rwandaise[123]). De plus le gouvernement rwandais tente de mettre fin aux critiques qui minaient la crédibilité de ses institutions judiciaires et de son système judiciaire en réduisant le nombre de prisonniers sans dossiers, en formant davantage de magistrats, en formant et en sensibilisant ses cadres aux questions des droits de l'homme et à la question de la parité dans un nouveau projet de constitution[124]. Il y a à mon sens, une volonté de plus en plus évidente du gouvernement rwandais de vouloir traiter la question de la répression du génocide au niveau exclusivement national et de s'affranchir ainsi de la tutelle internationale.
Incidemment, il est probable que les victimes du génocide rwandais soient à l'avenir peu encouragées par les autorités rwandaises et les ONG locales à comparaître devant le TPIR. Malheureusement et en dépit de tous les efforts faits par le TPIR pour informer les rwandais du travail effectué par le Tribunal[125], la juridiction ad hoc n'intéresse pas ou peu les rwandais qui a défaut d'être critiques sont relativement indifférents[126]. D'autre part les ONG de femmes victimes et de veuves du génocide se sont engagées auprès du gouvernement à encourager les femmes à participer aux procès Gacaca.
La participation des femmes dans les procès de Gacaca est vue par certaines ONG (comme AVEGA, SEKURA, Pro-femme) comme une opportunité pour renforcer le rôle des femmes dans la société et comme une garantie dans la prévention des conflits dont les femmes sont les premières victimes. « La femme, c'est l'espoir de la réconciliation nationale » selon le slogan lancé par Pro-femme qui a pris l'initiative de regrouper les femmes de victimes du génocide et celles dont les maris sont accusés. On le voit, le mot d'ordre est à la réconciliation nationale et au traitement national du contentieux du génocide rwandais. Les ONG rwandaises de femmes n'étaient pas a priori, jusqu'en mars dernier du moins, hostiles à la justice du TPIR. Néanmoins, il apparaissait clairement, avant janvier 2002, au cours de discutions et à la lecture des documents soumis par elles que leur priorité n'allait au TPIR, mais bien aux juridictions de Gacaca[127].
Ancrée dans la tradition, au pas de leurs portes, favorisant un mécanisme de réconciliation et de réhabilitation, encourageant les individus à participer au processus de "justice", les juridictions gacaca ont a priori toutes les qualités pour séduire les rwandais. Or les juridictions Gacaca ne seront pas appelées à connaître des affaires de violence sexuelle qui seront en principe jugées par les juridictions nationales. Par conséquent il semble difficile, quoi que souhaitent les ONG, que les violences sexuelles soient évoquées et traitées devant ces juridictions[128], d'autant plus qu'un certain nombre de difficultés apparaissent déjà après cinq mois de fonctionnements des juridictions tests.[129].
Toutefois, pas plus que devant les juridictions gacaca, les violences sexuelles ne sont à l'ordre du jour devant les juridictions traditionnelles[130]. Il y a plusieurs raisons à cela, en plus du tabou traditionnel des femmes sur cette question. Ces raisons concernent les difficultés financières et logistiques (de transport) ainsi que le risque de stigmatisation. Les victimes de violences sexuelles sont trop souvent confrontées au mépris des enquêteurs, aux moqueries de l'audience, à l'incompréhension et à la banalisation du viol par le personnel judiciaire, à la réticence des juges à mener des enquêtes supplémentaires, au malaise des avocats et à la honte d'elles-mêmes[131]. Par ailleurs, lorsqu'elles sont appelées à témoigner, les femmes contrairement à ce qui se passe au TPIR témoignent à visage découvert au cours d'audiences publiques s'exposant ainsi à la vindicte populaire et aux représailles potentielles des parents de l'accusé[132].
L'orchestration d'une active campagne médiatique visant à rompre les liens entre les ONG et le TPIR que l'on a très souvent accusé de se tenir trop loin de la population rwandaise, et la mise en place de juridictions locales traditionnelles, proches du justiciable, immédiates, concrètes et participative risquent d'accroître le désintérêt existant des élites et de la population envers le TPIR. Certes, il n'est pas encore possible à ce jour d'anticiper les conséquences de ces actions sur la volonté des témoins à accepter de venir à Arusha, mais un tel tournant demeure préoccupant.
Il est donc probable, pour la multitude des raisons invoquées ici comme dans les parties précédentes, que les témoins, y compris les femmes victimes de violence sexuelle, seront sinon découragées, voir non encouragées à l'avenir à venir témoigner devant le TPIR. A moins d'être informées (tenue informées), d'être extrêmement déterminées, et surtout supportées de manière appropriée et continue, les femmes risquent d'être de moins en moins présentes à la barre des témoins au TPIR .
Après un intérêt évident et certain du TPIR pour la poursuite des crimes de violence sexuelle, les perspectives immédiates de poursuite en cette matière sont, à ce jour, malheureusement assez mauvaises. Au faible taux d'incrimination pour violence sexuelle au cours des deux dernières années, s'ajoutent le discrédit qui autour du travail et du fonctionnement du TPIR, la révélation des scandales à répétition, la faiblesse des résultats judiciaires, la lenteur extrême des procédures, les remaniements constants de personnel et la politisation croissante des relations entre les rwandais et le TPIR, qui minent la confiance et la crédibilité de cette juridiction internationale.
Certes, ce n'est pas la première fois que le TPIR fait face à des incidents avec le gouvernement rwandais et l'histoire des relations entre le Rwanda et le TPIR est parsemée de déclarations de rupture de collaboration entre la juridiction internationale et le gouvernement[133]. Cependant jusqu'à ce jour, les autorités rwandaises n'avaient pris aucune mesure visant véritablement à empêcher le tribunal de fonctionner. Or la décision de juin 2002 des autorités rwandaises de modifier les conditions de délivrance des documents de voyage pour les témoins et le refus des témoins de venir à Arusha ont pour la première fois réellement empêcher pendant quinze jours[134] le tribunal de poursuivre les auditions et de maintenir la preuve dans certains cas. Cette évolution est préoccupante car c'est la raison d'être même du tribunal qui est menacée.
De surcroît, le Tribunal souffre encore d'une atteinte à sa crédibilité professionnelle. Indépendamment des aléas politiques, du bruit médiatique et des remous populaires qui entourent le travail du Tribunal, celui-ci a du mal à convaincre les professionnels de la justice de la qualité et de la fiabilité de son travail. Si les jugements de condamnation et d'acquittement sont la preuve que les juges travaillent efficacement et dans le respect des normes et des principes qui assurent à la décision sa validité juridique, ce dont nous devons tous nous réjouir, la mauvaise qualité des dossiers du procureur et le manque de professionnalisme de certains membres du greffe sont quant à eux largement responsables de cette perte de crédibilité. Quant bien même, le Tribunal a fait beaucoup de progrès pour résoudre les problèmes qui se posaient à lui, il est néanmoins préoccupant de constater que les droits de la défense sont parfois encore bafoués dans ces procès, que les dossiers d'accusation sont menés par des procureurs successifs, que les témoins sont malmenés lors des interrogatoires et contre-interrogatoires, et que les chefs d'accusation sont retirés après leur confirmation devant le juge de confirmation.
Qui plus est, les trop faibles résultats de l'activité judiciaire du TPIR en matière de condamnation pour violence sexuelle, le tournant politique du bureau du procureur en matière de poursuites de violences sexuelles, les problèmes de protection des témoins, et le modèle de common law qui fait du procureur davantage un stratège qu'un enquêteur, ont certainement contribué à décourager des femmes victimes à venir témoigner sur un sujet aussi sensible. La victime dans cette procédure accusatoire n'a de rôle qu'en tant que témoin, elle n'est pas un acteur au procès. Il est possible également que l'impossibilité pour les victimes de se porter partie civile décourage la volonté de certains témoins victimes de participer à une justice qui ne leur donnera pas les moyens de " de se rendre agissant" (empower-self) ni de se faire reconnaître et indemniser en tant que victime[135]. C'est d'ailleurs une donnée que Carla del Ponte, de tradition civiliste, que les négociateurs de Cour Pénale Internationale[136] et les juristes rwandais ont parfaitement comprise. C'est d'ailleurs l'un des éléments clés des juridictions gacaca.
Par conséquent, et à défaut d'un mécanisme de partie civile devant le TPIR, il revient à la poursuite de faire toute la lumière sur les crimes commis et d'inculper le criminel pour l'ensemble des crimes connus de lui. Or, non seulement la voix des victimes de violence sexuelle n'a pas été écoutée lorsqu'elle s'est exprimée, mais qui plus est, elles ont été volontairement sacrifiées sur l'autel de la rentabilité judiciaire. Plus que toute autre victime, la victime de violence sexuelle ne peut accepter d'être méconnue, ignorée et délaissée lorsqu'elle a fait ce premier vers la mise à jour de son terrible et honteux secret. Bien que la réaction des organes du Tribunal soit explicable et justifiable d'un point de vue technico-juridique, il apparaît néanmoins aux yeux des victimes qui sont au c?ur de cet enjeu que le Tribunal en cette matière a fait preuve d'un mépris phénoménal. Il en résulte que non seulement la confiance des victimes dans le TPIR est minée, mais également que la confiance des ONG de femmes et de survivants qui travaillaient à l'établissement de liens particuliers entres les femmes et le TPIR est si dégradée que l'on se demande si le travail du TPIR qui reste à effectuer sur la poursuite des violences sexuelles est encore possible.
Les résultats des procès dans les affaires clés relatives aux violences sexuelles (Niyitegeka, Semanza, Pauline Nyiramasuhuko et son fils Ntahobali Arsène seuls inculpés de violences sexuelle dans le dossier de Butare) ainsi que la mise en pratique de l'engagement pris par la défense dans le procès Cyangugu d'ouvrir une nouvelle procédure à l'encontre de Bagilishema et de Imanishimwe pour les poursuivre spécifiquement pour violence sexuelle[137], seront déterminants pour l'avenir du TPIR dont l'accomplissement repose sur la confiance des témoins et des femmes dans capacité du Tribunal à reconnaître l'ampleur des violences commises à leur encontre. Au moment où de nouveaux conflits démarrent sur le continent africain (Côte d'Ivoire) et d'autres s'enlisent, où de nouvelles juridictions pénales internationales entrent en fonction (la CPI et le tribunal ad hoc pour la Sierra Léone), la mission du tribunal, pour la double raison qu'il est africain et qu'il fut hardi dans sa jurisprudence Akayesu, est à un tournant capital de son histoire et de l'avenir du continent en matière de répression des crimes de violence sexuelle contre les femmes dans les situations de conflits armés.
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[1] Voir l'article premier du statut du Tribunal pénal pour le Rwanda, Résolution 955 du Conseil de sécurité du 8 novembre 1994, Conseil de sécurité des N.U., Doc. Off. S/RES/955 (8 novembre 1994.)
[2] Voir l'article 3§g du statut du TPIR, Ibid.
[3] Voir l'article 4§e du statut du TPIR, Ibid.
[4] Voir l'acte d'accusation amendé du 20 novembre 2000 dans l'affaire Eliezer Niyitegeka (Chefs d'accusation 8 et 9). Ces actes sont disponibles sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/ . Voir également pour une revue détaillée des actes d'accusation et de leur évolution, le site du groupe de travail des doctorants de McGill sur la justice internationale, et -index.fr/ pour la version française.
[5] Voir l'amendement à l'acte d'accusation du 23 juin 1999 dans l'affaire Semanza (chefs d'accusation 11 et 13). Ibid.
[6] Voir les § 507 et 508 du jugement Jean-Paul Akayesu, Chambre I, 2 septembre 1998. Disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/ .
[7] Voir les actes d'accusation contre Jean de Dieu Kamuhanda du 28 septembre 1999, confirmé le 1er octobre 1999 ; contre Éliezer Niyitegeka de 1996 amendé en 2000 et en 2001 ; contre Sylvestre Gacumbitsi du 20 juin 2001 et contre Jean Mpambara du 23 juillet 2001, supra note 4
[8] «While rape has been defined in certain national jurisdictions as non-consensual intercourse, variations on the act of rape may include acts which involve the insertion of objects and/or the use of bodily orifices not considered to be intrinsically sexual ». § 596. The chamber defines rape as a physical invasion of a sexual nature, committed on a person under circumstances which are coercive. » § 598 du jugement de l'affaire Akayesu, voir supra note 6. Ce paragraphe définit également les actes de violence sexuelle.
[9] Voir le rapport d'AVEGA-AGAHOZO, « Étude sur les violences faites aux femmes », Kigali, décembre 1999, pp.18-19.
[10] « Le viol est un acte criminel, une torture à caractère sexuel mais il est avant tout une tentative de mise à mort, un essai de meurtre. C'est une violence majeure en direction de la vie et la victime perçoit cette atteinte à l'essence même de son être. La personne est niée dans son identité car elle est niée dans sa parole, dans son refus, dans son désir. L'espace et le temps sont confondus dans cet instant qui laissera place à une désorientation et à perte de repères. Il n'y a qu'asservissement à la violence toute-puissante du tortionnaire. C'est l'effroi qui désigne au plus près ce que ressent la victime en étant ainsi confrontée à l'innommable de cette rencontre avec la mort, avec le néant. Le traumatisme n'est pas seulement une confrontation vitale, la victime se voit morte. La mort s'est imposée à elle comme un réel qui la laisse pétrifiée, sans mouvement et sans parole. » de V. Cormon, « Viols et métamorphoses » (2002) 1:1 Le Journal International de Victimologie.
[11] On se reporte à la date d'émission des premiers actes d'accusation en novembre 1995.
[12] Il est entendu que les actes d'accusation sont comptabilisés au nombre d'un acte par accusé indépendamment des amendements et des actes d'accusation joints qui ont émaillé l'histoire procédurale du dossier de l'accusé.
[13] A l'exception de Sherushago.
[14] Il s'agit des révélations du témoin H en mars 1997. Il est à remarquer que durant l'année 1997 3 procès concernant 4 accusés ont été menés. Sur ces 3 procès, seule l'affaire Akakyesu a fait état des violences sexuelles, alors qu'elles ont été évoquées dans d'autres affaires. La question par exemple n'a pas été explorée dans les autres procès pour les accusés : Ruzindana, Kayishema et Rutaganda ; alors que pour l'affaire RUZINDANA le 23ème témoin au procès a fait état de violences de nature sexuelle perpétrées contre les femmes. Voir les informations sur le procès de Ruzindana sur le site de la fondation Hirondelle, http://www.hirondelle.org/
[15] Ce mémoire d'amicus curiae n'a d'ailleurs pas fait l'objet d'une décision de refus ou d'acceptation de la part de la Chambre I. Le texte du mémoire d'amicus curiae est disponible sur le site http://www.ichrdd.ca/ Elle a été soumise en mai 1997 suite aux révélations du témoin H lors des audiences du procès Akayesu les 6 et 7 mars 1997.
[16] Car de l'aveu des membres de la Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits armés, la coalition avait, avant l'envoi du mémoire d'amicus curiae dans l'affaire AKAYESU, approché le procureur Louise Arbour pour appeler à une réforme du système des enquêtes sur les violences sexuelles. Voir Valérie Oosterveld et Rondha Copelon, « First rape charges brought at the Rwandan Tribunal » (Sept. 1997) 4 Human Rights Tribune p. 16. Voir également le rapport de HRW, Shaterred lives : sexual violence during the Rwandan Genocide and its aftermath, NY, septembre 1996 ; voir également un article publié en 1997 par Jan Goodwin, « Rwanda : the justice denied » (1997) 6 :4 On the issue, disponible sur le site / (date d'accès : Juillet 2002).
[17] « À la suite de ce second atelier, une équipe spéciale chargée des violences sexuelles a été mise sur pied. » Voir le §52 du second rapport sur les activités du TPIR pour la période 1996-1997, Assemblée générale des N.U., 13 novembre 1997, Doc. Off. A/52/582-S/1997/868. Voir également le § 52 du troisième rapport annuel sur les activités du TPIR pour la période 1997-1998, Assemblée générale des N.U., 23 septembre 1998, Doc. Off A/53/429-S/1998/857.
[18] Voir le §54 du quatrième rapport annuel sur les activités du TPIR pour la période 1998-1999, Assemblée générale des N.U., 7 septembre 1999, Doc. Off, A/54/315-S/1999/943.
[19] Ibid.
[20] Voir le § 59 du troisième rapport annuel sur les activités du TPIR, supra note 17.
[21] Voir le § 55 du quatrième rapport annuel sur les activités du TPIR, supra note 18. Nous supposons que la formation traitait des questions de violences sexuelles puisqu'elles sont le second volet de la nouvelle stratégie du procureur définie en 1997. Mais nous n'avons aucune certitude sur ce fait.
[22] Dans son cinquième rapport sur les activités du TPIR, les enquêteurs affirment avoir recueilli 600 déclarations de témoins dont 113 ayant spécifiquement trait aux violences sexuelles.Voir le § 134 du cinquième rapport annuel sur les activités du TPIR pour la période 1999-2000, Assemblée générale des N.U., 2 octobre 2000, Doc. Off. A/55/435-SS/2000/927.
[23] «Le succès patent que représente le fait qu'un accusé dont la collaboration est susceptible de faire progresser les enquêtes en cours plaide coupable ainsi que le nombre accru des actes d'accusation et des arrestations constituent un tournant décisif dans la stratégie du Procureur visant à poursuivre de manière dynamique les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire, afin de mettre un terme au cycle de l'impunité dans le génocide rwandais». Voir le §153 du cinquième rapport sur les activités du TPIR, Ibid.
[24] Voir les §102-108 du troisième rapport annuel sur les activités du TPIR,supra note 17.
[25] Ce qui a été mis en place au niveau du recrutement du personnel du TPIR à compter de 1998, voir le quatrième rapport sur les activités du TPIR au § 102 (1998-1999), supra note 18: Cette initiative s'est traduite ultérieurement de la façon suivante en 1999-2000: «S'agissant de la parité des sexes dans la catégorie des administrateurs, le TPIR comptait, au 31 août 1999, sur un total de 209 fonctionnaires de ce niveau, 52 femmes et 157 hommes. À cette date, sur les 15 fonctionnaires de niveau P-5, 3 étaient des femmes, soit 18 % des effectifs considérés. Au 31 octobre 1999, sur 211 postes appartenant à la catégorie des administrateurs, 79 étaient occupés par des femmes, soit une proportion de 27 % des effectifs». Voir le § 116 du cinquième rapport sur les activités du TPIR, supra note 22. Au 30 avril 2001, au titre de la catégorie des adminsitrateurs, 72 sont des femmes sur 258 adminsitrateurs. Dans la classe des P-5, deux des fonctionctionnaires sur les 19 étaient des femmes. Voir le le § 205 du sixième rapport sur les activités du TPIR pour la période 2000-2001, Assemblée générale des N.U., 14 septembre 2001, Doc. Off. A/56/351-S/2001/863.
[26] La division d'aide aux témoins a été établie dans le cadre du greffe le 24 juin 1996 conformément au règlement de procédure et de preuve. Voir le premier rapport sur les activités du TPIR pour la période 1994-1996, Assemblée générale des N.U., 24 septembre 1996, Doc Off.. A/51/399-S/1996/778, au § 70.
[27] Voir le § 82 du troisième rapport sur les activités du TPIR (1997-1998), supra note 20.
[28] Voir le rapport de la «Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits : protection des témoins au TPIR» (17 octobre 1997), disponible sur le site de Droits et Démocratie, . (date d'accès: 10 novembre 2002).
[29] Voir le § 82 du quatrième rapport (juin 1998-juillet 1999), supra note 17. En janvier 1999, une étude a été faite sur les femmes venues témoigner dans l'affaire Akayesu. Des recommandations ont été présentées au Greffier en ce qui concerne en particulier les mesures à prendre après le procès et la nécessité d'envisager un programme systématique pour le suivi des témoins. Cette étude a mis en relief certains aspects touchant à la relocalisation des témoins femmes et aux services d'orientation destinés aux femmes et le Tribunal a pris contact à cette fin avec des donateurs pour qu'ils appuient cette initiative.
[30] Voir le para 87 du quatrième rapport, supra note 18.
[31] Voir le para 102 du cinquième rapport, supra note 22.
[32] Pour un détail du programme et des sommes allouées, voir le rapport de International Crisis Group (IGC), « International Criminal Tribunal for Rwanda : Justice delayed », IGC, NY, 7 juin 2001, à la note de bas de page 76. Disponible sur le site / (date d'accès : 15 octobre 2002).
[33] Voir les paragraphes 106 à 108 du troisième rapport sur les activités du TPIR, supra note 17.
[34] Cela ne vise pas uniquement les femmes qui acceptent de témoigner pour l'accusation. Voir la réponse du greffier Okali aux accusations des avocats de la défense de J-P Akayesu concernant le programme en annexe de la conférence de presse donnée le 9 octobre 2000, ICTR/INFO-9-13-017, à la p.3 de sa réponse, disponible sur le site http://www.ictr.org/wwwroot/ENGLISH/pressbrief/2000/okreply.pdf . On y trouve également une copie de la lettre des avocats d'Akayesu.
[35] Pour une meilleure compréhension des différends systèmes pénaux nationaux et du poids du témoignage dans les systèmes accusatoires et inquisitoires, voir une étude de droit pénal comparé qui décrit les différents systèmes pénaux nationaux réalisée par M.E.I Brienen et E.H. Hoegen, Victims of crime in 22 European Criminal Justice systems : the implementation of recommendation (85) 11 of the Council of Europe on the position of the victim in the framework of Criminal Law and Procedure, Netherlands, 2000. Disponible sur le site http://www.victimology.nl/onlpub/Brienenhoegen/BH.html (date d'accès: Septembre 2002).
[36] Voir le § 134 du cinquième rapport sur les activités du TPIR (1999-2000), (nos soulignés), supra note 22.
[37] Voir le § 55 du quatrième rapport sur les activités du TPIR (1998-1999), supra note 18.
[38] Voir le § 134 du cinquième rapport sur les activités du TPIR (1999-2000), supra note 22.
[39] Voir par exemple les § 22-24 du deuxième rapport du TPIR qui fait état de l'impossibilité de localiser les 16 témoins de la défense réfugiés dans le camp de Tingi-Tingi au Zaïre suite à une attaque du camp, supra note 17. On peut supposer que le problème se pose aussi pour les témoins de l'accusation. Voir également la difficulté du TPIR à localiser des témoins suite à une éruption volcanique dans la région de Gnoma, région frontalière de Gisenyi (Rwanda) pour enquêter sur la validité de l'alibi de l'accusé, voir le § 37 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), Assemblée générale des N.U., 2 juillet 2002, Doc. Off A/57/163-S/2002/733.
[40] En effet ce n'est qu'en 2000 que pour la première fois, la sous-section d'aide aux victimes et aux témoins (accusation) a pris des dispositions pour recueillir la déposition d'un témoin malade hospitalisé. Voir le § 172 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), supra note 25. Pour la première fois également, pour des raisons de sécurité le témoignage par vidéo-conférence a été utilisé dans le procès des médias en 2002, non sans quelques problèmes d'ailleurs. Voir le § 30 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), Ibid.
[41] Voir Martine Schotsman, « Violences sexuelles pendant le génocide : les femmes réclament justice » (1999) 4 Le Verdict. Les femmes ne souhaitent pas davantage parler devant les tribunaux nationaux des violences sexuelles qu'elles ont subies: « Des femmes affirmeront avoir résisté aux appétits sexuels fanatiques de leurs protecteurs pendant des mois et des mois par simple ruse en amadouant leurs bourreaux par des promesses hypothétiques alors que beaucoup de tortionnaires ont versé dans le génocide pour le simple plaisir sexuel. Par pudeur et souvent par hypocrisie déguisée, elles préfèreront garder leur secret au prix même de ne pas dénoncer les criminels. » dans le rapport du Centre de documentation et d'information sur les procès de génocide (Liprodhor), Problématique de la preuve dans les procès de génocide : l'institution imminente des juridictions gacaca constituerait-elle une panacée ?, Kigali, juin 2002, à la p.28.
[42] Voir les § 54 et 55 du quatrième rapport sur les activités du TPIR (1998-1999), supra note 18.
[43] Il est bon de rappeler que deux témoins ont été assassinés suite à leur témoignage dans les affaires Akayesu et Rutaganda. Voir le § 51 du deuxième rapport sur les activités du TPIR (1996-1997), supra note 17. C'est un problème récurrent semble t-il car l'ONG rwandaise IBUKA fait à nouveau état de telles menaces dans son rapport de 2002. Ces menaces sont d'autant plus pernicieuses qu'elles émanent de personnes anciennement en situation d'autorité. Voir également le témoignage des victimes et l'avis des experts sur le site du Women's Caucus for Gender Justice, (date d'accès: Juillet 2001). Cependant, il semblerait toutefois selon le TPIR qu'aucun lien direct de cause à effet n'ait pas pu être établi entre l'assassinat de ces témoins et leur témoignage. Voir la réponse du TPIR aux accusations du gouvernement rwandais et des ONG IBUKA et AVEGA: « More than 500 witnesses testified have testified before the Tribunal so far. No case of a witness being attacked or killed because of their evidence has been reported to the Tribunal. » (nos soulignés) dans ICTR, Note by the International Criminal Tribunal for Rwanda on the reply of the government of Rwanda to the report of the prosecutor of the ICTR to the Security Council du 8 août 2002, en annexe du rapport de FIDH (Fédération Internationale des Droits de l'Homme), Entre illusions et désillusions : les victimes devant le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR), FIDH, Paris, octobre 2002, disponible sur le site http://www.fidh.org/ (date d'accès : 30 octobre 2002), au § 25. Enfin ce rapport de la FIDH, qui n'a interrogé que 7 témoins, rapporte que la protection des témoins est assurée par le TPIR dans les locaux du Tribunal et jusqu'à la frontière rwandaise, mais qu'une fois arrivés sur le territoire rwandais, leur protection est assurée par les autorités rwandaises. Ceci est problématique car les victimes ont généralement peu confiance dans les autorités administratives. Voir le rapport de la FIDH (Fédération Internationale des Droits de l'Homme), à la p.10.
[44] Voir la décision de rejet du mémoire d'amicus curiae envoyé par l'ONG African Concern dans l'affaire Musema du 17 mars 1999 demandant à ce que les victimes soient indemnisée, disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/
[45] Voir le rapport d'AVEGA sur les violences faites aux femmes à la p.41, supra note 9.
[46] Dans l'affaire Akayesu, les témoins ont au printemps 1997 fait état de viols et de violences sexuelles qui ont entraîné l'ajournement du procès en juin 1997. En octobre 1997 les femmes victimes ont en effet été appelées à la barre pour témoigner des violences sexuelles commises à leur encontre par Akayesu suite à l'amendement de l'acte d'accusation du 17 juin 1997, supra note 14.
[47] La fondation Hirondelle rapporte que le 23ème témoin dans cette affaire aurait fait état de mutilation sexuelle. L'avocat de la défense se serait opposé à ce que ce témoignage soit versé au dossier.
[48] Dans cette affaire, il a fallu attendre la déclaration du 21ème témoin confirmant et complétant les dires de plusieurs autres témoins sur l'implication de Musema dans les violences sexuelles pour que les juges acceptent l'amendement de l'acte d'accusation le 5 mai 1999, après trois mois d'auditions, et trois ans après la confirmation de l'acte d'accusation en juillet 1996. Bien que l'acte ait été amendé une première fois le 18 novembre 1998, il ne faisait pas état des violences sexuelles. Par la suite le verdict de culpabilité pour viol sera annulé par la Cour d'appel sur la base de deux nouveaux témoignages à décharge. Il est remarquable que les juges qui ont accordé l'amendement pour ajouter les chefs de violences sexuelles dans l'affaire Musema sont les mêmes que ceux qui avaient accordé l'amendement dans l'affaire Akayesu : feu Laïta Kama, Navanethem Pillay et Lennart Aspegren.
[49] Voir le rapport d'AVEGA, supra note 9 à la p. 24. Les actes d'accusation des coaccusés dans ce procès joint de Butare, dont ceux de deux accusés dénoncés par AVEGA ne comportent aucune référence aux violences sexuelles alors que des incidents sont signalés dans les actes d'accusation.
[50] Il est vrai par contre, que d'autres personnes dénoncées dans ce rapport font l'objet de poursuite pour violence sexuelle devant le TPIR : c'est le cas notamment de Pauline Nyaramasuhuko et Augustin Ndindiliyimana.
[51] La responsable de l'antenne d'AVEGA dans la région de Cyangugu nous a confirmé que 108 cas de viols avaient pu être recensés dans 12 communes, villes et autres lieux différents. Informations reçues par fax le 17 janvier 2001.
[52] La requête aux fins d'autorisation pour le dépôt d'un mémoire amicus curiae par la Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits armés fut rejetée le 24 mai 2001 par une décision des juges de la IIIème chambre composée de Lloyd George Williams, Y. Ostrovsky, et Pavel Dolenc. La poursuite dans ses arguments pour le rejet du mémoire d'amicus curiae mentionnait 1) le fait que la stratégie de poursuite relevait de la discrétion du procureur, et 2) que les juges avaient déjà oralement statué sur l'inadmissibilité de la question des violences sexuelles comme question ne faisant pas l'objet du débat faute d'accusation de ce type dans les actes d'accusation. Voir le § 9 de la décision des juges du 24 mai 2001, ICTR Doc Off. « Decision on the application to file an amicus curie brief according to rule 74 of the rules of procedure and evidence filed on behalf of the NGO coalition for women's human rights in conflict situations ». La décision est disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/
[53] « En particulier, le Tribunal doit s'assurer que sous sa juridiction, la question des violences contre les femmes sera traitée avec la même gravité que les autres crimes contre l'humanité. » Ces recommandations ont été émises par AVEGA dans son rapport de 1999, supra note 9 à la p. 57.
[54] Voir § 138 du cinquième rapport sur les activités du TPIR (1999-2000), supra note 22.
[55] Cette reconnaissance dans le cadre du procès Cyangugu aurait peut-être obligé le Tribunal à tenir deux procès différents, l'un pour Bagambiki et Imanishimwe, et l'autre pour Ntagerura.
[56] Réalisé en 1999-2000, voir les § 75, 93, 98, 107 et 108 du cinquième rapport sur les activités du TPIR (1999-2000), supra note 22
[57] Voir le § 79 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40.
[58] Voir le § 40 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), supra note 25.
[59] Voir les § 17 et 20 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40.
[60] Voir l'article de V. Cormon, psychologue et thérapeute, sur les difficultés rencontrées par les professionnels pour aborder le viol, supra note 10. Il écrit ceci : « Mais face aux difficultés de parler pour la victime, se dressent aussi les défenses de ceux qui écoutent. Ainsi derrière le viol, se profile toute la question des relations hommes/femmes, professionnelles de la relation d'aide ou non. » Or la majorité du personnel du TPIR est masculin, et la majorité de ce personnel est de tradition africaine (65%). Pour un éclaircissement de ce que cela implique quant aux relations hommes/femmes dans la société africaine à partir de l'exemple rwandais, et tout en étant parfaitement conscient qu'il existe des différences et des nuances d'une société à une autre, voir le chapitre sur la situation de femme dans le rapport d'AVEGA sur les violences faites aux femmes, supra note 9.
[61] Voir le § 77 du quatrième rapport sur les activités du TPIR (1998-1999), supra note 18; voir également le § 150 du cinquième rapport sur les activités du TPIR (1999-2000), supra note 22.
[62] Voir en ce sens l'article de Jacques Nizeyimana, « Kigali : le leadership du FPR s'estime en droit d'exonération de poursuites sur les crimes de génocide et de crimes de guerre », (2 août 2002) disponible sur le site / (date d'accès : 15 novembre 2002). Voir la conférence de presse de Carla del Ponte du 6 décembre 2001 sur sa volonté de poursuivre les membres du FPR, disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/ (date d'accès : 30 octobre 2002). Voir également le rapport d'IGC sur le TPIR, supra note 32, aux pp. 34-35, et le rapport de la FIDH, supra note 43.
[63] Voir le § 5 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), supra note 22
[64] En effet, le 24 avril 2001, l'assemblée générale des NU a nommé deux nouveaux juges au TPIR dont la malgache Arlette Ramasoron (qui vient du système de droit civil), et le 31 mai 2001, le secrétaire général des NU nomme la sénégalaise Andrésia Vaz (de tradition civiliste) en remplacement du juge Laïta Kama, décédé. Voir les § 9 et 10 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), Ibid.
[65] Voir les § 107 et 108 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), Ibid.
[66] Voir le § 109 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), Ibid.
[67] Voir le § 116 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), Ibid.
[68] Voir les déclarations d'AJIIR (Action pour une justice Internationale Impartiale pour le Rwanda), communiqué AJIIR/)1/10.02, (date d'accès : 15 novembre 2002).
[69] A plusieurs reprises, le président du TPIR évoque le manque de préparation des procureurs sur leur dossier. Voir les § 44 et 94 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), supra note 25. Par ailleurs dans ce rapport le président évoque au § 97 le changement de personnel mais sans mentionner exactement le nombre de personnes limogées. Le nombre communiqué provient de source confidentielle.
[70] Voir le § 11 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40, voir également le § 122 du sixième rapport. Il semblerait au 30 octobre 2002, que le poste soit toujours vacant.
[71] Patricia Viseur-Sellers est à présent en charge de ce dossier depuis La Haye.
[72] Le nombre de poursuites prévues pour les prochaines années est de 24. Voir le § 22 c) du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40. Voir également la conférence de presse donnée par Carla del Ponte du 6 décembre 2001 « There is within the international community increasing concern about the additional years of work for the ICTR and when the Tribunal could close its doors. And I may say that the number of investigations had also caused some alarm.», disponible sur le site http://www.ictr.org/ . Voir par exemple les déclarations du Nigeria et de l'Union Européenne sur la lenteur des procès rapportées dans la conférence de presse donnée par le porte-parole du TPIR du 12 juin 2000, ICTR/INFO-9-13-015.
[73] Voir le § 125 du sixième rapport sur les activités du TPIR, supra note 25.
[74] Voir les § 123 et 125 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), supra note 25, ainsi que les § 14 et 15, 30 et 38, 45, 46, 47 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40.
[75] Voir le rapport d'AVEGA sur les violences faites aux femmes, supra note 9 à la p.22.
[76] Voir le rapport de stage de Bridgette Toy-Cronien, « ANZSIL support to Interns » (Mai 2002) 7 Australian and New Zealand Society of International Law Newsletter, disponible sur le site /
[77] Les règles de procédure ont été amendées à cet effet en juillet 2002, voir l'article 11 bis. Voir le §10 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40. Voir la conférence de presse du 8 juillet 2002, disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/
[78] Voir la figure 2.
[79] Voir le § 58 du septième rapport sur les activités du TPIR, supra note 40.
[80] Voir l'article de Thierry Cruvellier, « ICTR, a wind of change », disponible sur le site .org/ Voir également le rapport d'IGC sur le TPIR, supra note 32, aux pp.11 et 12.
[81] Voir le discours du président du TPIR à l'Assemblée générale des NU du 28 octobre 2002, disponible sur http://www.ictr.org/ (date d'accès : 15 novembre 2002).
[82] Notamment comme génocide et complicité de génocide. La jurisprudence Akayesu sera t-elle reprise ? Il est a noté que le jugement SEMANZA sera tout aussi intéressant notamment quant à la qualification de viol comme torture.
[83] De source confidentielle.
[84] Voir le mémorandum envoyé à Louise Arbour par la Coalition d'ONG pour le droit des femmes en situation de conflits d'octobre 1997 sur la protection des témoins au TPIR, supra note 28 et voir également le rapport conjoint d'AVEGA et d'AGURUKA de mars 2002 sur ce problème. Enfin voir le rapport de la FIDH sur la question des témoins, supra note 43.
[85] Voir le § 119 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), supra note 25 et le § 75 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40.
[86] Voir le § 106 du sixième rapport sur les activités du TPIR (2000-2001), Ibid.
[87] Selon le rapport d'IGC, les critiques seraient également venues des ONG rwandaises qui ont participé au programme. Voir le rapport d'IGC sur le TPIR, supra note 32 à la p. 32.
[88] Voir le § 37 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40.
[89] Voir la conclusion du discours de Navanethem Pillay devant le Conseil de sécurité des N.U., Ibid.
[90] Ceci est d'autant plus vrai que la question des réparations au niveau national ne reçoit pas davantage de meilleur traitement. Selon le Centre de documentation et d'information sur les procès de génocide aucun jugement n'aurait été exécuté pour obtenir des dommages et intérêts, et le gouvernement rwandais qui a été condamné plusieurs fois à payer solidairement des dommages et intérêts ne s'était pas en juin 2000 acquitté de sa dette. Voir le rapport sur les juridictions gacaca, supra note 41 à la p. 13.
[91] Voir l'article d'Hirondelle du 30 juin 2000 qui annonce que les présidents des deux tribunaux ad hoc cherchent un mécanisme pour offrir une compensation aux victimes du génocide. Navanethem Pillay aurait déclaré dans sa conférence de presse : « Nous avons pensé approcher le Conseil de sécurité des Nations Unies pour amender le statu, afin d'étendre notre mandat pour que nous puissions compenser les victimes. », disponible sur le site http://www.hirondelle.org/ (date d'accès : 29 août 1998). Voir également la conférence de presse donnée par Carla del Ponte le 20 décembre 2000 faisant état de la possibilité de geler les comptes de Milosevic pour permettre la compensation des victimes, référencé FH/P.I.S./555-e, disponible sur le site du Project on International Courts and Tribunals, / . Plus récemment, la présidente Pillay écrivait dans son septième rapport sur les activités du TPIR : « Le procureur continue à souligner l'importance de faire connaître au peuple rwandais et en particulier aux victimes des crimes relevant de la compétence du TPIR l'?uvre du Tribunal. (..) Il est favorable au renforcement de la participation des victimes et des rescapés du génocide aux instances engagées devant le Tribunal et nourrit l'espoir de voir donner au Tribunal une plus grande latitude pour les indemniser. » [nos soulignés] au § 72 du septième rapport (2001-2002), supra note 40.
[92] Une première fois en octobre 2000, la question de la compensation des victimes et des personnes injustement accusées a été réorientée pour ce concentrer sur cette dernière question uniquement, voir la conférence de presse du 9 octobre 2000, ICTR/INFO-9-13-017 tenue après la discussion du groupe informel créé par le Conseil de Sécurité sur ces questions, et la comparer avec les annonces faites par les juges des deux tribunaux en mai 2000, Ibid. « Tout en souscrivant au principe de l'indemnisation des victimes, les juges estiment que la responsabilité du traitement et de l'appréciation des demandes en réparation du préjudice ne devraient pas incomber au Tribunal mais à d'autres organismes des Nations-Unies. » Voir le § 84 du sixième rapport sur les activités du TPIR, supra note ?. Voir également le rapport d'IGC sur le TPIR, supra note 32 aux pp.33-34.
[93] Voir le § 91 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40.
[94] Voir en ce sens les solutions envisagées par le gouvernement rwandais dans son projet de loi sur la compensation. Voir le rapport d'IGC, supra note 32 à la p. 33.
[95] Il est à noter que le but premier du TPIR, n'est pas de produire de la jurisprudence pour le développement du droit international pénal, mais de poursuivre les personnes responsables de génocide et de contribuer ainsi au processus de réconciliation nationale. Voir le préambule de la résolution 955 du 8 novembre 1994 qui établit le statut du TPIR, supra note 1. Voir également en ce sens le rapport d'IGC sur le TPIR, voir supra note 32 pp. 23-28.
[96] Bizarrement, on ne peut manquer de relever que c'est Adama Dieng, greffier qui aurait décidé de ne pas renouveler les contrats des enquêteurs. Il s'agirait pour le greffe de préserver l'intégrité du système de l'aide juridictionnelle. « On 16 July the Registrar of the Internatioanl Criminal Tribunal for Rwanda decide that the contracts of certain investigators employed by the defence councel would be suspended or would not renewed » (nos soulignés). Voir le communiqué de presse du TPIR du 17 août 2001, ICTR/INFO-3-04.EN, disponible sur le site http://www.ictr.org/ (date d'accès : 15 octobre 2002). Voir également le communiqué de presse du 21 mai 2001, ICTR/INFO-9-2-266.EN.
[97] Il était connu sous le nom de Sammy Bahati Weza. Voir Thierry Cruvellier, « Investigators under scrutiny » (21 mai 2001) Diplomatie judiciaire, disponible sur le site .com/UK/Tpiruk/ImanishimweUK1.htm (date d'accès : 15 octobre 2002).
[98] Dont un sera réhabilité après enquête sur son identité. Il s'agit de Aloyce Ngendahimana, Voir Sukhdev Chhatbar, « Rwanda genocide suspect nabbed in Brussels » (6 January 2002) Arusha Times, disponible sur le site / (date d'accès : 15 octobre 2002). Les contrats de Augustin Basebaya ayant travaillé sur le dossier Kajelijeli, Augustin Karera ayant travaillé sur le dossier de Jean de dieu Kamuhanda et Aloyce Ngendahimana n'ont pas été renouvelés à expiration. Le contrat de Thaddée Kwitonda travaillant sur le dossier d'Arsène Shalom Ntahobali accusé de viol est suspendu pour enquête. Voir l'agence hirondelle, « Rwanda Tribunal sacks investigators suspected of genocide » (16 Jully 2001) disponible sur le site http://www.hirondelle.org/ (date d'accès : 15 octobre 2002) et le communiqué de presse du TPIR du16 juillet 2002, ICTR/INFO-9-3-03.EN.
[99] Il ne résulte aucune accusation de cette mention. Cela tend simplement à souligner que connaissant le tabou qui existe autour des violences sexuelles tant de la part des enquêteurs, que de la part des victimes et des accusés, l'intégrité des personnes qui ont accès aux dossiers de l'accusation doit être absolue et dépourvue de toute suspicion si l'ont souhaite conserver une relation de confiance dans un domaine si délicat que sont les violences sexuelles.
[100] Il s'agirait de Patrick Sswimbwa Bugingo arrêté en Tanzanie en novembre 2001.Il aurait travaillé avec l'équipe de la défense de Semanza. Voir l'article de Sukhdev Chhatbar, Ibid.
[101] Voir le cas de Pierre-Claver Karanga qui travaille pour la défense de Augustin Ndindiliyimana. Il aurait été mis en cause en mars 2002.Voir Thierry Cruvellier, « The Karangwa trap » (26 avril 2002) Diplomatie judiciaire, disponible sur le site .org/ (date d'accès : 15 octobre 2002). Voir également le communiqué de presse des ONG Ibuka et Avega de mars 2002 qui cite un certain nombre d'enquêteurs de la défense autres que ceux mis en cause par le procureur du TPIR. Certains de ces enquêteurs auraient des liens familiaux avec les accusés.
[102] Voir par exemple l'article de Kate Gehring, « Defense investigators posed as ICTR reps, Prosecutor claims » (18 juin 2001) Internews, disponible sur le site internet http://www.globalpolicy.org/intljustice/tribunals/2001/0615rwnd.htm (date d'accès: 15 octobre 2002). Elle rapporte dans cet article qu'un enquêteur s'est fait passé pour un enquêteur de la poursuite auprès d'une femme victime de viol commis par Kanyabashi, accusé dans le procès de Butare.
[103] Ibid.
[104] Ibid. Depuis, 600 rwandais ex-FAR et Interamwe ont été rapatriés au Rwanda dans le cadre des accords de Lusaka, selon les propos de Pierre-Marie Lafrance, observateur aux droits de l'homme auprès de la MUNOC, notes personnelles recueillies lors d'une conférence donnée à l'UQAM (Université du Québec à Montréal) le 19 novembre 2002. Selon les propos de la responsable de la Commission pour la réconciliation et l'unité nationale au Rwanda, d'autres rapatriements seraient prévus pour fin novembre 2002. Notes personnelles recueillies lors d'une conférence donnée à l'université McGill, le 20 novembre 2002. Voir également, Mamadou Bah, « De Kamina à Kigali : Chronique d'une opération de DDRRR » article du 17 octobre 2002, disponible sur le site de la MONUC, / (date d'accès : 15 novembre 2002).
[105] Voir l'article de Thierry Cruvellier et Franck Petit, « Unprotected witmess » (10 novembre 2001) Diplomatie judiciaire, disponible sur le site ; relayé par la suite par Mark Turner, « Giggling judges undermine case for international courts : Rwanda's genocide tribunal epitimises the problems in applying the law to man's humanity » (14 février 2002) The financial times, disponible sur Interews, http://www.internews.org/ (date d'accès : 15 octobre 2002). Voir également Hirondelle, « Genocide survivors cut cooperation with UN Tribunal » (25 janvier 2002), disponible sur le site http://www.hirondelle.org/ (date d'accès : 15 octobre 2002).
[106] La présidente du TPIR avait pris vivement la défense des juges dans un mémorandum distribué à la presse et critiquant les fausses allégations rapportées par cet article de diplomatie judiciaire. La scène aurait été mal interprétée par le journaliste, et les rires dans la salle auraient été causés par une réaction du public aux questions des avocats de la défense. Quoiqu'il en soit, l'erreur du Tribunal et de la poursuite est d'avoir tenu une audience publique sur cette question délicate et taboue. Voir le communiqué de presse du 14 décembre 2001, ICTR/INFO-9-3-07.EN. Disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/
[107] C'est un rapport de l'OIOS des NU qui a mis l'affaire au grand jour., « Report on possible fee splitting between detainees and defence counsel at the ICTR and ICTY », Assemblée générale, Doc. Off NU, A/55/759, Annexe 2 du 1er février 2001.
[108] Voir Hirondelle, « Rwanda reacts to ICTR prosecutor's report to UN security council » (9 août 2002), disponible sur le site http://www.hirondelle.org/ (date d'accès : 15 octobre 2002). Voir la Réponse du gouvernement Rwandais au rapport de présenté par le Procureur du Tribunal international pour le Rwanda au Conseil de sécurité, Conseil de Sécurité, Doc. Off. S/2002/842, du 26 juillet 2002 en annexe du rapport de la FIDH, supra note 43.
[109] Cette décision est encore plus fâcheuse quand on connaît le rôle essentiel des ONG de femmes auprès des témoins potentiels féminins. Voir le rapport de Martien Shotsmans d'Avocats Sans Frontières qui affirme que le génocide a beaucoup influencé les relations entre les gens et que les rescapés se sentent le mieux compris par les autres rescapés, pas ou trop peu compris par les rapatriés, et rejetés par les familles des détenus. Voir le Résumé du rapport « Recherche sur la perception par les rescapés de leur situation actuelle », ASF (Avocats sans Frontières), décembre 2001, disponible sur le site http://www.asf.be/ (date d'accès : 15 novembre 2002).
[110] Voir le § 34, 41 et 87 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), supra note 40. Voir également les sources provenant d'Hirondelle sur cette question.
[111] Voir les § 86 et 87 du septième rapport sur les activités du TPIR (2001-2002), Ibid.
[112] Concernant les affaires Niyitegeka et Pauline Nyiranasubuko, la présidente Pillay a saisi le Conseil de sécurité par lettre du 26 juillet 2002, adressée au Président du Conseil de Sécurité Conseil de Sécurité, Doc Off. S/2002/847.
[113] On songe notamment à la possibilité pour le Tribunal de juger les citoyens rwandais (membres de l'APR Armée patriotique rwandaise) ayant commis des violations graves du droit humanitaire sur son territoire et sur le territoire de ses voisins (Congo et Zaïre) sous l'autorité de certains membres du FPR aujourd'hui au pouvoir. Voir l'article de Jacques Nizeyimana, supra note 62 et la conférence de presse de Carla del Ponte du 6 décembre 2001 sur sa volonté de poursuivre les membres du FPR, disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/ (date d'accès : 30 octobre 2002). Elle aurait à nouveau réitérer cette déclaration dans une conférence de presse du 4 avril 2002 et aurait signalé le manque de coopération du président Kagamé. Le texte de la conférence de presse n'est pas disponible sur le site du TPIR. Voir la conférence de presse du procureur rwandais Gérald Gahima du 26 juillet 2002 aux Nations Unies, résumé disponible sur le site de diplomatie judiciaire, .com (date d'accès 16 septembre 2002).
[114] Voir sur Hirondelle les incessants atermoiements du greffe qui propose, négocie puis annule la mise en place d'une commission conjointe d'enquête sur les mauvais traitements des témoins, les accusations du gouvernement Rwandais dirigées contre le greffe et contre les équipes des avocats de la défense, les demandes évolutives et changeantes des ONG, les critiques des avocats de la défense envers le représentant du Rwanda, le greffe et la poursuite, la saisine du Conseil de sécurité par le président du TPIR relative au défaut de coopération du Rwanda, la volonté du Tribunal de tenir des procès à Kigali soutenue en cela par les ONG locales ce qui est vivement contestée par les avocats de la défense.
[115] Éventuellement car le Tribunal semble avoir le soutien des pays africains, voir Hirondelle, « African Countries urged to support Rwandan Tribunal », 24 mai 2002), disponible sur le site http://www.hirondelle.org/ (date d'accès : 15 octobre 2002)
[116] Certains évoquent le marchandage qui s'est effectué entre le gouvernement de Kagame et les Nations Unies (sous l'influence des USA). L'abandon des poursuites contre les membres du FPR seraient le prix à payer pour l'exécution des accords de Lusaka sur le rapatriement des rwandais au Congo. Voir le communiqué d'AJIIR (Action pour une Justice Internationale Impartiale) du 12 octobre 2002, disponible sur le site / (date d'accès : 15 novembre 2002). L'équipe spéciale chargée d'enquêter sur ces affaires aurait été démantelée et le chef canadien de cette équipe d'enquête aurait été muté en Sierra Léone. Il est totalement impossible de vérifier la véracité de ces allégations.
[117] La présidente du TPIR met cet aspect en avant lors de son discours à l'Assemblée générale des NU : « At present, trial are proceeding, but it is pertinent to note that in 5 trials, the Defence is presenting its case and most of the defence witnesses come from outside Rwanda. Of the 122 defence witnesses that came at the ICTR this year, 8 came from Rwanda. The issue of travel of witnesses from Rwanda must be resolved, for trial hearing prosecution testimony to resume on time. » (nos soulignés). Voir le rapport de Navanethem Pillay au conseil de sécurité des N.U. du 29 octobre 2002, disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/
[118] Voir le site du gouvernement du Rwanda, section génocide et justice, (date d'accès: 30 octobre 2002).
[119] Pour une étude des enjeux judiciaires rencontrés par les juridictions rwandaises, voir le rapport du centre de documentation et d'information sur les procès de génocide (Liprodhor), supra note 41. Voir également le rapport de ICG (International Crisis Group), « La justice en question » 7 avril 1999, disponible sur le site / (date d'accès : juin 2000).
[120] Sur le concept de la Gacaca traditionnelle, voir l'article de Fr. Xavier Gasimba, « Gacaca : le point de vue des instances de base » (2000) 15-16 Le verdict, à la p. 31. Pour une critique de la Gacaca, voir le dossier complet publié par ce numéro de Verdict (2000) 15-16.
[121] Les juridictions Gacaca sont chargées de juger les crimes de catégorie trois et quatre, c'est à dire les personnes accusées d'atteintes à l'intégrité physique (de blessures volontaires et mauvais traitements) n'ayant pas causés la mort, et les personnes accusées d'atteinte aux biens. Les personnes ayant commis des meurtres, ou ayant commis des crimes ayant entraîné la mort, de même que les personnes ayant commis des actes de génocide et de crimes contre l'humanité, ou des actes de violence sexuelle relèvent des tribunaux judiciaires. Voir le rapport du centre de documentation et d'information sur les procès de génocide, Liprodhor, supra note 41.
[122] « Selon plusieurs analystes, la raison d'être de Gacaca n'était pas seulement de sanctionner le coupable, il avait pour devoir, en outre, de réconcilier les parties, en vue de favoriser la concorde sociale et sa pérennité. » Voir le rapport de la Liprodhor, « Les Juridictions gacaca au Rwanda, Résultats de la recherche sur les attitudes et opinions de la population rwandaise », Kigali, 2000, à la p. 13.
[123] Tel est le cas de Géraldine Umugwaneza ancienne présidente d'AVEGA et de Patricie Mukanyundo, anciennement Liprodhor. Elles ont toutes deux été nommées à la sixième chambre de la Cour suprême, celle qui s'occupe des juridictions Gacaca. Le rapport de la FIDH fait état de liens entre certaines associations et le gouvernement rwandais : Joseph Nsengimana représentant de ASRG-Mpore est un ancien ministre et un conseil à la présidence, Antoine Mugesera, président d'IBUKA est membre exécutif du FPR. Voir le rapport de la FIDH, supra note 43 à la p. 15. Il se trouve que ce sont ces ONG qui ont mené une campagne médiatique importante à l'encontre du TPIR. Voir les derniers numéro d'Ubutabera sur le site de diplomatie judiciaire : .org/
[124] Voir notamment les § 25, 26, 27 du rapport du représentant spécial Michel Moussali, sur la situation des droits de l'homme au Rwanda : « Question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, où qu'elles se produisent dans le monde. Situation des droits de l'homme au Rwanda » Doc. Off. Commission des droits de l'homme, E/CN.4/2001/45/Add.1, 21 mars 2001. Voir le rapport dithyrambique de International Crisis Group sur la justice rwandaise, « La justice en Question ». supra note 119. Pour une vision plus modérée, voir le rapport de la Liprodhor, « Regards prospectifs sur les procès de génocide au Rwanda (19996-1999), octobre 1999, ainsi que le rapport du Centre de documentation et d'information sur les procès de génocide (Liprodhor) supra note 41.
[125] Voir pour cela la réponse du greffier Adama Dieng suite à la parution du rapport d'IGC sur le TPIR, ICTR/INFO-9-3-01.EN du 11 juin 2001.
[126] Il est à mettre à leur actif que le Tribunal du fait de son caractère ad hoc ne peut et ne pourra juger les 120.000 participants au génocide, et qu'il s'est fixé pour mission de juger les criminels les plus symboliques pour l'ampleur de leur responsabilité dans les massacres commis, dans leur organisation et planification, et dans leur supervision et perpétration. Voir le discours de Carla del Ponte au Conseil de Sécurité du 27 novembre 2001, disponible sur le site du TPIR, http://www.ictr.org/ . Le travail du TPIR n'est donc pas leur quotidien, cela ne signifie qu'il n'est pas important, mais qu'il est subsidiaire dans la réalité de l'homme de la rue et des collines. Ainsi s'exprime Noël Twagiramungu, secrétaire exécutif de la Ligue des droits de l'homme dans la région des grands lacs : « On the whole, Rwandans attach very little interest to the ICTR. » danr le rapport d'IGC, supra note 32, à la p. 25. Selon le rapport de la FIDH, les ONG rwandaises reconnaissent qu'elles ont porté peu d'intérêt jusqu'à présent aux activités du TPIR, supra note 43 à la p.19. Nous ignorons ce qu'il est advenu du projet de radio sur le TPIR pour lequel l'ONG Haguruka avait reçu des subsides de la part du programme du TPIR. Voir le rapport d'IGC, supra note 32 à la p.31, note de bas de page 76
[127] Voir les documents d'étude soumis par les ONG rwandaises au cours de la réunion annuelle de la Coalition en octobre 2001.
[128] Voir le rapport de Pro-femmes Twese Hamwe, « Plan stratégique en matière de genre et gestion des conflits 2002-2004 », Kigali (Rwanda), mars 2001, disponible sur le site http://www.international-alert.org (date d'accès 20 novembre 2002), voir également le rapport de Martine Schotsmans, Recherche sur la perception par les rescapés de leur situation actuelle, supra note 109. Une des propositions faite par M. Schotsmans consisterait à témoigner devant un comité restreint ou devant un intermédiaire qui relaterait le témoignage devant la gacaca.
[129] Voir l'article de Hirondelle du 1er octobre 2002 sur la Gacaca au Rwanda. Cette étude montre un manque d'intérêt croissant pour ces juridictions tests et le rejet systématique des crimes commis par le FPR. Disponible sur le site http://www.hirondelle.org/ (date d'accès : 15 novembre 2002). Voir également l'article Monde de Jean-Philippe Rémy consacré à ces juridictions, « Le Rwanda essaie d'inventer une nouvelle justice du génocide » (22 juin 2002) Le Monde, disponible sur le site http://www.lemonde.fr/ dans lequel il est mentionné qu'un juge gacaca a été accusé de viol et de détention forcée par une femme.
[130] Voir le rapport de Martine Schostmans et Le Cocq, « Le droit à la réparation des victimes de violences sexuelles pendant le génocide : analyse de l'état actuel ? obstacles- suggestions de solutions », ASF (Avocats sans Frontières), mars 2000. Par exemple en 1999, sur 1051 personnes inculpées en 1999, 49 auraient été poursuivies pour viol ou pour tortures sexuelles, et sur ces 49 personnes poursuivies, seulement neuf auraient été condamnées (une pour viol et les autres pour torture)..
[131] Voir l'article de Martien Schotsmans, supra note 41.
[132] Voir le rapport de Pro-femmes Twese Hamwe, supra note 128, à la p. 7.
[133] On rappelle entre autre l'affaire de Jean-Bosco Barayagwiza en 1999. Celui-ci avait obtenu de la cour d'appel l'annulation de toutes les poursuites à son encontre en raison des violations répétées à ses droits durant la phase préjudicielle. A la suite de cette décision, le Rwanda avait annoncé qu'il décidait de suspendre sa collaboration avec le TPIR. Voir pour un rappel historique de cette question le rapport d'IGC sur le TPIR, supra note 32.
[134] Certes ce ne sont que quinze jours, mais cela démontre la capacité du gouvernement rwandais et des ONG rwandaises de bloquer le processus judiciaire s'ils le souhaitent. En ce qui concerne la durée, cette information provient du discours de N. Pillay au Conseil de sécurité des N.U., supra note 117.
[135] En effet, si le modèle accusatoire inspiré du système de la Common Law fait du témoin la pierre angulaire de la poursuite, il maintient la victime dans un rôle de témoin descriptif et passif, soumis au contre-interrogatoire minutieux de la défense dont l'objectif est de mettre la crédibilité du témoin. Cette assise dans le statut de victime au détriment de celui de survivant proactif capable de déclencher la poursuite et envers laquelle le procureur aura l'obligation de rendre des comptes, gêne ce processus de résilience nécessaire à victime de violence sexuelle. Au-delà de la parole et des mots, la victime doit se reconstruire, reconstruite son image corporelle et sexuelle, sociale, et cette reconstruction de soi passe par l'agir. C'est peut-être l'un des raisons qui expliquent le désarroi et la déception des témoins victimes.
[136] Selon le § 101 du sixième rapport sur les activités du TPIR, Carla del Ponte aurait étudié avec certaines organisations non gouvernementales, la possibilité pour elles de saisir les Chambres de première instance, au nom des victimes, supra note 25. Voir l'article 68 des dispositions du règlement de procédure et de preuve de la CPI sur cette question, .
[137] Engagement qui a été pris par la poursuite dans sa réponse sur la demande de dépôt d'amicus curiae déposée par la Coalition pour le droit des femmes en situation de conflits armés dans l'affaire Cyangugu, et qui a été repris par les juges de la chambre III pour justifier entre autre le refus d'accorder le dépôt du mémoire d'amicus curiae, voir supra note 52, au § 20.
Tribunal pénal international pour le Rwanda
http://www.ictr.org (site officiel)